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LE RAMEAU D’OR

s’y jeter, et de chercher dans la fin de sa vie celle de ses malheurs.

Il fut abordé par une petite vieille, qui avait une fraise au cou, un vertugadin, un moule sous ses cheveux blancs, un chaperon de velours ; et son antiquité avait quelque chose de vénérable. — Mon fils, lui dit-elle, vous poussez des regrets bien amers ; je vous prie de m’en apprendre le sujet. — Hélas ! ma bonne mère, lui dit Sans-Pair, je déplore l’éloignement d’une aimable bergère qui me fuit ; j’ai résolu de l’aller chercher par toute la terre, jusqu’à ce que je l’aie trouvée. — Allez de ce côté-là, mon enfant, lui dit-elle, en lui montrant le chemin du château où la pauvre Brillante était devenue sauterelle. J’ai un pressentiment que vous ne la chercherez pas longtemps. Sans-Pair ls remercia.

Le prince n’eut aucune rencontre sur sa route digne de l’arrêter ; mais en arrivant dans le bois, proche le château du magicien et de sa sœur, il crut voir sa bergère ; il se hâta de la suivre ; elle s’éloigna. Le fantôme fuyait encore plus loin ; et dans cet exercice, le reste du jour se passa. Lorsque la nuit fut venue, il vit beaucoup de lumières dans le château : il se flatta que sa bergère pouvait y être. Il y court ; il entre sans aucun empêchement. Il monte, et trouve dans un salon magnifique une grande et vieille fée d’une horrible maigreur. Ses yeux ressemblaient à deux lampes éteintes ; on voyait le jour au travers de ses joues. Ses bras étaient comme des lattes, ses doigts comme des fuseaux, une peau de chagrin noir couvrait son squelette ; avec cela elle avait du rouge, des mouches, des