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LE RAMEAU D’OR

rubans verts et couleur de rose, un manteau de brocart d’argent, une couronne de diamants sur la tête, et des pierreries partout.

— Enfin, prince, lui dit-elle, vous arrivez dans un lieu où je vous souhaite depuis longtemps. Ne songez plus à votre petite bergère ; une passion si disproportionnée vous doit faire rougir. Je suis la reine des Météores ; je vous veux du bien, et je puis vous en faire d’infinis si vous m’aimez. — Vous aimer, s’écria le prince, en la regardant d’un œil indigné, vous aimer, madame ! Hé ! suis-je maître de mon cœur ! Non, je ne saurais consentir à une infidélité ; et je sens même que si je changeais l’objet de mes amours, ce ne serait pas vous qui le deviendriez. Choisissez dans vos Météores quelque influence qui vous accommode ; aimez l’air, aimez les vents, et laissez les mortels en paix.

La fée était fière et colère en deux coups de baguette elle remplit la galerie de monstres affreux, contre lesquels il fallut que le jeune prince exerçât son adresse et sa valeur. Les uns paraissaient avec plusieurs têtes et plusieurs bras, les autres avaient la figure d’un centaure ou d’une sirène, plusieurs lions à la face humaine, des sphinx et des dragons volants. Sans-Pair n’avait que sa seule houlette, et un petit épieu, dont il s’était armé en commençant son voyage. La grande fée faisait cesser de temps en temps le chamaillis, et lui demandait s’il voulait l’aimer ? Il disait toujours qu’il se vouait à l’amour fidèle, qu’il ne pouvait changer. Lassée de sa fermeté, elle fit paraître Brillante : Hé bien, lui dit-elle, tu vois ta maîtresse au fond de cette galerie, songe à ce que tu vas faire ; si tu refuses de m’épouser, elle sera