Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/223

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« Ah ! que l’immortel Molière les a bien dépeints, lorsqu’il a dit des faux dévots, qu’ils sont :


… Prompts, vindicatifs, sans foi, pleins d’artifices ;
Et pour perdre quelqu’un couvrent insolemment
Des intérêts du ciel leur fier ressentiment.


tandis qu’au contraire les vrais dévots, ceux-là qu’il faut suivre à la trace, sont toujours disposés à l’indulgence,


Et ne veulent point prendre avec un zèle extrême,
Les intérêts du ciel plus qu’il ne veut lui-même.


« Toutes ces réflexions ont été présentes à la pensée de ceux qui nous ont donné la législation actuelle sur la presse.

« La loi du 17 mai n’a pas voulu venger les hommes, mais les choses.

« Assurément il faut avoir une religion. J’ai la mienne, c’est celle de mes pères : j’en connais les devoirs et les principes ; j’y demeurerai fidèle jusqu’au tombeau. Mais, quelque bon catholique que l’on soit, cela ne dispense pas de juger les autres avec cette indulgence que l’on doit à ses frères… C’est ce qu’a voulu la loi du 17 mai, faite par des hommes qui tous avaient des mœurs et de la religion, mais qui n’ont pas voulu qu’on trouvât dans leur loi un moyen de persécution contre leurs semblables.

« Aussi cette loi ne punit pas ceux qui attaquent ou révoquent en doute une croyance particulière, des pratiques qu’il est d’ailleurs bon de respecter ; mais ceux qui offensent la morale publique et la morale religieuse, deux généralités qui couvrent la terre et qui la régissent.

« La morale publique n’est pas la morale particulière de certains hommes, de certaines classes, de