Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/331

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poëte comme un de ces hommes qu’un pouvoir inhumain interdisait, au nom du ciel, du commerce de leurs semblables, tout ce qui a consenti à avoir quelques rapports avec lui à l’occasion de son livre, libraires, imprimeurs, semblent avoir contracté une souillure. Ils sont prévenus avec lui.

« Étrange accusation, qui semble demander à un pays tout entier de se repentir des sentiments qu’un grand talent et qu’un noble caractère lui ont inspirés ; étrange accusation, que la raison publique désavoue, qui produit l’effet d’un véritable anachronisme, et qui paraît subie tout aussi bien par le ministère que par le prévenu lui-même. Non, la cause de l’accusation n’est pas dans les chansons mêmes, elle est ailleurs.

« Vous le savez, messieurs, une administration, qui dans son antipathie pour les intérêts et pour les sentiments nationaux avait tout bravé, jusqu’au mépris, est tombée enfin à la voix du prince et de la patrie. Dans la violence de son dépit, le parti qu’elle représentait nous menace par ses clameurs, et nous attaque par ses intrigues. Ses débris tendent à se réunir ; ils s’agitent autour du trône pour persuader que le sol est ébranlé ; malheur à notre pays, si jamais les organes de cette faction vaincue surprenaient à ceux de qui dépendent nos destinées un autre sentiment que celui qu’elle inspire à la France !

« C’est cette faction, qui, cherchant quelque consolation dans le mal qu’elle peut faire encore, a imposé par ses clameurs à un ministère dont la faiblesse trahit parfois les intentions, le devoir d’un procès contre un poëte qui a le plus contribué à lui arracher le masque dont elle se couvrait. Comme nous, messieurs, le ministère subit aujourd’hui ce procès.