Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le concours de l’arc commence. Télémaque fait inutilement le premier essai, puis il dépose l’arc et la flèche nue contre la porte, en invitant les prétendants à mieux faire.

Antinoos. — De la gauche à la droite, allons ! que nos amis viennent tous, à la file, en commençant du même bout que l’échanson !

Tous ayant approuvé ces mots d’Antinoos, ce fut le fils d’Œnops, Liodès l’aruspice, qui s’en vint le premier : son siège était au coin, tout près du beau cratère ; seul, il avait l’horreur de leurs impiétés et leur montrait son blâme. Donc il prit, le premier, l’arc et la flèche ailée et, montant sur le seuil, debout, il fit l’essai, mais ne put tendre l’arc. À tirer sur la corde, il eut bientôt lassé ses blanches mains débiles. Il dit aux prétendants :

Liodès. — Amis, ce n’est pas moi qui tendrai l’arc : à d’autres ! Mais cet arc va briser et le cœur et la vie à plusieurs de nos princes s’il est vrai que, pour nous, cent fois mieux vaut mourir que vivre sans avoir enfin la récompense d’une si longue attente, après tant de journées passées en ce manoir !

Il dit et, sur le sol ayant déposé l’arc, il l’appuya aux bois des panneaux joints et lisses, puis reprit le fauteuil qu’il venait de quitter.

Alors Antinoos se mit à le tancer :

Antinoos. — Quel mot s’est échappé de l’enclos de tes dents ! C’est un mot, Liodès, terriblement cruel ! j’enrage de l’entendre. Donc il faut que cet arc brise à bien des héros et le cœur et la vie, parce