Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/332

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crépusculaire, plongée dans une fumée blanche ; ils étincelaient sur la pierre et tombaient sur les fenêtres des cabanes. L’homme à son tour s’éveilla. Ses yeux rencontrèrent sur la muraille un portrait que baignait la lumière ; ils s’y fixèrent. Il commença à agiter les lèvres et à prier à voix basse, puis de plus en plus haut. Pendant ce temps des gens entrèrent dans la cabane, ils s’agenouillèrent silencieusement. La jeune fille tressaillait, la vieille nasillait son chant et bavardait avec les voisins. Les gens racontèrent à Lenz que l’homme était arrivé il y avait longtemps dans la contrée, on ne savait d’où ; il avait la réputation d’un saint, il voyait les sources sous terre et pouvait adjurer les esprits, et l’on se rendait en pèlerinage vers lui. Lenz apprit en même temps qu’il s’était fort éloigné du Steinthal ; il s’en retourna avec quelques bûcherons qui allaient dans le pays. Il se trouva bien d’avoir de la compagnie ; il se sentait maintenant mal à l’aise, en face de cet homme qui lui semblait à certains moments proférer des paroles terribles. Il avait peur aussi de lui-même dans la solitude.

Il rentra à la maison. Cependant la nuit précédente avait fait sur lui une profonde impression. Le monde était devenu clair à ses yeux, et il se sentait attiré vers un abîme par une force irrésistible. Il fouillait en lui-même, il mangeait peu ; la moitié de ses nuits se passait en prières et en rêves fiévreux. Il avait une soif violente d’action,