Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/336

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il demanda un vieux sac. Elle s’effraya. On lui donna ce qu’il réclamait. Il enroula le sac autour de lui, comme un pénitent, et prit le chemin de Fouday. Les gens de la vallée le connaissaient déjà ; on racontait diverses choses étranges sur son compte. Il entra dans la maison où était l’enfant. Les gens se rendaient insouciamment à leurs affaires. On lui indiqua une chambre : l’enfant était étendu en chemise sur une table en bois recouverte de paille.

Lenz frissonna en touchant les membres froids et en voyant les yeux vitreux à moitié ouverts. L’enfant lui semblait si abandonné, et lui-même se sentait si seul et si solitaire ! Il se jeta sur le cadavre. La mort lui fit peur, une vive douleur s’empara de lui : ces traits, ce visage immobile devaient se corrompre ! Il s’agenouilla, il demanda à Dieu, avec tous les gémissements du désespoir, de lui faire un signe et de ressusciter l’enfant, et il lui dit combien il était malheureux ; puis il s’enfonça dans ses pensées et concentra toute sa volonté sur un point ; il resta ainsi longtemps assis, immobile. Ensuite il se leva et saisit les mains de l’enfant en disant d’une voix haute et ferme : « Lève-toi et marche ! » Mais les murailles lui renvoyèrent froidement l’écho de ses paroles, comme une raillerie, et le cadavre resta froid. Alors il tomba sur le sol, à moitié fou ; puis il se sentit poussé irrésistiblement vers la montagne. Des nuages passaient rapi-