Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/346

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mement confus. Cet incident, la nuit, prit l’aspect le plus terrifiant. Ce n’est qu’avec la plus grande peine qu’il s’endormit, tandis qu’il avait encore cherché un peu auparavant à remplir ce vide désespéré. Il tomba entre le sommeil et la veille, dans un état affreux ; il se heurtait à quelque chose d’épouvantable, d’horrible, la folie l’empoignait ; il se leva en sursaut avec des cris effroyables, baigné de sueur, et c’est peu à peu seulement qu’il se remit. Il lui fallut, pour revenir à lui, recommencer par les choses les plus simples. En réalité ce n’était pas lui qui faisait cela, mais un puissant instinct de conservation ; il lui semblait qu’il était double et qu’une de ses parties cherchait à sauver l’autre et se faisait appel à elle-même ; il racontait, il déclamait des poésies. Enfin il recouvra la raison.

Ces accidents se produisaient également le jour, et ils étaient encore plus terribles ; jusqu’alors la clarté l’en avait préservé. Il lui semblait alors qu’il existait seul au monde, que celui-ci ne subsistait que dans son imagination, qu’il n’y avait rien en dehors de lui-même ; qu’il était l’éternel damné, le Satan, seul avec ses pensers douloureux. Il passait en revue sa vie avec une rapidité insensée, puis disait : Logique, logique ; si quelqu’un ouvrait la bouche : Illogique, illogique ; c’était le gouffre d’une folie irrémédiable, d’une folie à travers l’éternité. Le vif désir de la santé morale le poursuivait ; il se jetait dans les bras d’O-