Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/345

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douiller ; qu’une terreur inexprimable se peignait sur ses traits, qu’il saisissait convulsivement par le bras les personnes proches de lui, et qu’enfin il retrouvait progressivement sa raison. Était-il seul ou lisait-il, c’était pire encore : toute son activité intellectuelle tenait parfois dans une seule pensée ; songeait-il à une personne étrangère, ou se la représentait-il avec vivacité : il se prenait alors pour elle, il s’embrouillait, et il avait à cette occasion un désir infini de soumettre dans son imagination tout à sa volonté ; la nature, les hommes, — à l’exception d’Oberlin, — tout lui faisait l’effet d’un songe et était froid ; il s’amusait à mettre les maisons sur les toits, à habiller et à déshabiller les individus, à inventer les plaisanteries les plus insensées. Parfois il se sentait une envie irrésistible d’exécuter la chose qu’il avait précisément dans l’idée, et il se livrait à des grimaces horribles. Un jour il était assis près d’Oberlin ; le chat reposait en face de lui sur une chaise. Soudain ses yeux devinrent fixes, il les tint obstinément dirigés sur l’animal, puis il glissa lentement de sa chaise. Le chat fit aussitôt de même. Comme magnétisé par son regard, il éprouva une crainte énorme et se hérissa timidement, tandis que Lenz conservait la même attitude, le même visage terrible et grimaçant ; tous deux, comme en proie au désespoir, fondirent impétueusement l’un sur l’autre, et il fallut que Madame Oberlin se levât pour aller les séparer. Lenz fut de nouveau extrê-