Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/171

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Bucquoy de se relever, et de marcher à pied environ cinquante pas vers l’armée malgré la perte de son sang. Les hongrois survenus en plus grand nombre firent retirer le Marquis De Gonzague, jettérent le Comte De Bucquoy par terre de deux autres coups de lance, et ayant fait une décharge de tous leurs pistolets sur lui, il mourut sous la grêle de tant de coups, dont il s’en trouva treize qui étoient mortels. La honte et le courage reprirent le Marquis De Gonzague, qui revint à la charge avec le Sieur De Camargues, et quelques soldats ralliez des fuiards. Ils percérent bravement jusqu’au lieu où étoit leur général, qu’ils trouvérent mort. Le marquis descendit de son cheval, sur lequel il chargea lui même le corps pour le transporter au camp.

Les impériaux consternez de la perte de leur général, ne songérent plus qu’aux moiens de lever le siége de Neuhausel. Mais pour sauver les apparences, ils demeurérent encore quelques jours, pendant lesquels ils prirent des mesures pour se retirer en bon ordre. C’est ce qu’ils firent durant la nuit du 27 de juillet, et M Descartes revint à Presbourg avec les françois et les wallons, qui étoient en grand nombre dans l’armée du Comte Du Bucquoy.

Une avanture aussi funeste que celle dont il venoit d’être le témoin, acheva de le dégoûter de la profession des armes. Nous serions trop faciles si nous nous laissions aller à l’opinion de ceux qui ont publié qu’il a encore servi contre les turcs. Quand M Descartes auroit eu envie de le faire, il seroit difficile de trouver une occasion qui se fût présentée en ce têms-la pour favoriser ce dessein.

Les impériaux n’avoient rien à démêler pour lors avec les turcs ; et il auroit fallu que M Descartes pour se satisfaire, eût passé en Pologne ou en Moldavie, qui étoit le théatre ordinaire de la guerre entre les polonois et les turcs. Dés l’an 1620, le jeune Sultan Osman avoit fait la paix avec la Perse pour déclarer la guerre à la Pologne. Les turcs et les polonois s’étoient battus mutuellement en diverses rencontres sur la fin de la même année, et au commençement de la suivante. La guerre dura jusqu’au mois de novembre : et les cosaques, tantôt seuls, tantôt avec les polonois, y firent périr par le fer plus de cent mille turcs, jusqu’à ce qu’Osman se vid obligé de demander la paix, qui termina la campagne de cette année.