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LES EXILÉS


L’Île


C’est un riant Éden, un splendide Avalon,
Que le grand Nord féerique a voilé dans sa brume,
Et les chênes géants, l’ombre du frais vallon,
Y montrent pour ceinture une frange d’écume.

Les fiers camellias, les aloès pensifs,
Fleurissent en plein sol dans l’île fortunée
Que la rose parfume, et contre ses récifs
L’inconsolable mer se débat enchaînée.

La mer, écoutez-la rugir ! La vaste mer
Dresse, en pleurant, ses monts aux farouches descentes
Et soupire, et ses flots échevelés dans l’air
Hurlent comme un troupeau de femmes gémissantes.

Elle pense, elle songe, et quelque souvenir
L’agite. Avec ses cris, avec sa voix sauvage
Elle annonce quelqu’un de grand qui va venir.
Il vient ; regardez-le passer sur le rivage.