Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/170

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parée de joyaux, et maquillée avec soin. Car elle n’a pas voulu faire peur à un épicurien que tout le monde aime tant, et qui s’aime tant lui-même.

— « Me voilà, dit-elle. Que me veux-tu ?

— Moi ? répond Tizoles, violemment surpris et montrant avec embarras la petite Morize, je veux que tu m’aides à…

— Ah ! pardon, murmure la visiteuse, qui déjà s’enfuit, moi je ne me mêle pas de ça : je fais tout le contraire ! »


C. — PROPOSITION DÉSHONNÊTE

Avec son guide infatigable, à la légère barbe frisée et au visage brun, qui le mène par les sentiers de chamois, le poète Josz est arrivé brisé, sanglant, mais ivre d’espace et d’air pur, au sommet de la haute montagne. Les deux voyageurs ont sur leurs fronts l’orgueil de la victoire ; les aigles volent au-dessus de leurs têtes, et sous leurs pieds s’entassent les nuages, déjà pleins du souffle effrayant de la tempête. À ce moment, Josz voit que, de brun qu’il était, son guide devient tout noir, avec des yeux rouges de braise et des lueurs phosphorescentes dans sa chevelure. Et ce bizarre compagnon sourit de la façon la plus engageante, mais en montrant de petites dents délicieusement vertes, comme les premières tendres feuilles du printemps.