Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/233

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en naissant sous le baiser glacé de la Fatalité, et une prunelle limpide qui s’emplit de ciel.


32. — CAROLINA, LAPONNE

Tout Paris a connu au théâtre des Funambules cette grosse naine, miniature absurde et farouche, que le hasard s’était plu à développer en femme de Rubens. Elle avait de petits traits, de grosses joues, des pieds et des mains en boule, une poitrine comme celle de mademoiselle George. Elle était haute comme une botte et fière comme une reine. Elle aimait un géant, à qui elle disait : « Mets-moi sur la table, et approche-toi pour que je te donne un soufflet. » Le géant posait Carolina, Laponne, sur la table, et s’approchait ; elle lui donnait un soufflet à décorner un bœuf. Puis elle lui disait : « Maintenant, pose-moi à terre. » Le géant la prenait dans ses bras et il la posait à terre. Il était calme comme un mouton, elle furieuse.


33. — PIERROT

Le plus cher favori du peuple parisien, plus délicat que ne le furent jamais les Alexandre le Grand et les Adrien ; car, décidé à adorer ce personnage bouffon que l’Italie lui avait envoyé gras, balourd, grimaçant, gour-