Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/174

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conséquent ils ne peuvent être divisés en deux strophes. Mais il ne l’ose pas, car il se rappelle ce que nous avons posé de façon à n’avoir plus besoin d’y revenir : à savoir que chez tous les lyriques de tous les pays et de tous les temps, excepté en France au xviie et au xviiie siècle, époque où le sentiment et la science de la versification furent oblitérés et perdus, le Sens et le Rhythme poursuivent parallèlement leur route, sans se croire obligés de faire halte aux mêmes endroits. Et l’on peut s’en convaincre, non-seulement en lisant, mais en regardant les Odes d’Horace.

La même observation que nous avons faite pour les Ïambes s’applique à ce rhythme de Ronsard :


Ô grand’beauté, mais trop outrecuidée
          Des présens de Venus,
Quand tu voirras ta face être ridée
          Et tes flocons chenus.
Contre le temps et contre toi rebelle,
          Diras en te tançant :
Que ne pensois-je alors que j’estois belle
          Ce que je vay pensant ?
Ou bien pourquoy à mon désir pareille
          Ne suis- je maintenant ?
La beauté semble à la rose vermeille,
          Qui meurt incontinent.

Ronsard. À Jeanne impitoyable. Odes, Livre III, XII.


Elle s’applique aussi à cet autre rhythme du même poète :