Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/211

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autres fileuses du pays, — ces premiers propos devaient revenir à Néel avant d’atteindre les Sombreval.

Eux, par leur position si cruellement exceptionnelle, étaient trop loin de tout pour pouvoir être blessés de rien. Leur vie retirée les mettait personnellement hors de la portée des médisances ou des calomnies. Le temps n’apportait aucun démenti à l’austérité de leur solitude. Sombreval, qui avait d’abord, ainsi que l’avait dit Jacques Herpin, marché la terre à sens et à dessens, tout à coup rompit avec cette vie en plein air qui avait été la sienne quelques jours.

L’ivresse de la possession de cette terre, à lui enfin, était probablement évaporée ! il passa bientôt tout son temps dans les combles du château (où il avait établi son laboratoire) à poursuivre la composition de ses philtres qui, dans ses idées et dans ses espérances, devaient rétablir la santé de sa fille, si profondément vulnérée.

Attelé à cette besogne dans laquelle ce grand travailleur devait consumer autant d’âme que de génie, il ne sortait de ses fourneaux que pour descendre, noir et farouche comme un Cyclope, dans le salon où se tenait sa fille, et se reposer de ses travaux, au fond desquels elle était encore.