Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/253

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pouvait méconnaître, — car elle avait la vibration de l’orgue dans ses basses profondes et étendues, — résonna tout à coup et prononça le nom de Calixte. Arrêté par ce nom tout-puissant qui faisait toujours le silence d’une église devant le saint-sacrement dans son cœur, Néel écouta ce qu’ils disaient d’elle, comme si tout ce qui se rapportait à elle lui appartenait de plein droit, et qu’il n’y eût plus d’indiscrétion à écouter.

— Non, — disait Sombreval, — Calixte n’a rien à craindre de ce que tu crains, la Malgaigne. L’avantage de parias comme nous est de pouvoir vivre comme il nous convient, sans que le monde ait rien à y voir. Le monde et nous sommes trop éloignés l’un de l’autre pour pouvoir réciproquement nous blesser.

— Mais si ces enfants allaient s’aimer ? dit la Malgaigne.

— Tant mieux ! fit Sombreval tranquille. C’est déjà fait, du moins pour l’un des deux !

Le cœur de Néel battait dans sa poitrine comme une cloche.

— Le jeune de Néhou aime Calixte, reprit Sombreval : et qui ne l’aimerait, l’adorable enfant ? Mais Calixte, elle, est trop pure et trop parfaite pour aimer personne sur cette terre, — ajouta-t-il avec l’âpre mélancolie d’un homme qui, en disant sur cette terre, disait partout ;