Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/254

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ne pouvant croire qu’il y eût un être à aimer ailleurs.

— Et l’on dirait que tu le regrettes, Jean ! — fit la vieille fileuse avec une insistance pleine de pensées ; — et cependant, si elle l’aimait comme il l’aime, — car il l’aime, tu l’as bien vu, Sombreval, — ce serait un malheur de plus pour tous les deux !

— Pourquoi ? fit la voix de Sombreval avec la confiance de la force. Pourquoi donc ? Si elle l’aimait, je le lui donnerais. Je n’attends que cela, la Malgaigne ! J’irais le lui chercher jusqu’à Néhou, jusque dans les bras de son père, et je le lui apporterais, comme la première fois qu’elle le vit je le lui rapportai sans connaissance et l’étendis devant elle sur le mur de la grille du Quesnay. Oui, je le lui donnerais pour qu’elle fût heureuse d’abord et ensuite, qui sait ? guérie. La nature cache des secrets que la science veut apprendre en vain et qui la défient. Quand il s’agit de cette machine nerveuse qu’on appelle la femme, qui sait l’influence que pourrait avoir ce grand fait physiologique du mariage ?… Dans une foule de cas, ç’a été un remède. Eh bien ! Calixte épouserait Néel et serait peut-être sauvée.

— Épouser Néel de Néhou ! Encore ton orgueil, Jean ! — dit avec une pitié triste la Mal-