Page:Barbusse - Pleureuses, 1920.djvu/218

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Ô calme souvenir, ô reine désolée,
Puisque tout va mourir avec la nuit qui meurt,
Va-t’en tout doucement dans ta robe étoilée
Avec ton voile d’ombre et de vague rumeur.

Ô reine, cette nuit on dirait que tu pleures,
Cette nuit, c’est le triste et le suprême accueil…
Va-t’en tout doucement le long des calmes heures
Avec tes yeux mi-clos sur tes regards en deuil.

Tu pars avec la foi baignant tes yeux célestes
Et ton front incliné de toutes les douleurs,
Avec le grand oubli qui s’endort dans tes gestes,
Tes gestes qui frôlaient, muets comme des fleurs.

La plaine est en repos comme un champ de bataille,
La tristesse pardonne aux cris lointains du jour
Et mon âme ce soir s’attendrit et tressaille
Ainsi qu’une douleur devant des yeux d’amour.