Page:Barckhausen - Montesquieu, l’Esprit des lois et les archives de La Brède, 1904.djvu/46

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De nos jours, où une presse grossière traite couramment, en France, et sans danger, le Chef de l’État de pleutre et les Ministres de voleurs, quelques personnes accuseront, sans doute, Montesquieu de s’être résigné trop docilement aux exigences de la Censure. Avant de lui infliger un blâme, il faudrait se rappeler qu’une attitude plus raide aurait empêché la libre circulation de son ouvrage dans le royaume. L’Esprit des Lois n’était pas une de ces brochures qui se glissent de poche en poche. Les principes fondamentaux, essentiels, du système de l’auteur restaient, d’ailleurs, absolument intacts. Qu’importait au triomphe final de la Vérité le retranchement de quelques applications particulières !

Encore toutes les concessions de Montesquieu faillirent-elles être insuffisantes. Il n’en fut pas moins en proie aux attaques les plus hargneuses. Le grand homme, menacé dans son repos, se demanda s’il n’irait pas hors de France expier l’œuvre de génie dont il venait de doter le Genre humain.

VIII

Pour une conscience scrupuleuse comme l’était celle de Montesquieu, un travail nouveau s’impose après la publication d’un ouvrage. Les papiers de La Brède nous fournissent des renseignements inédits sur les corrections faites à l’Esprit des Lois dès qu’il fut imprimé, tout aussi bien que sur les critiques dont ce traité fut l’objet. On sait que le texte actuel, courant, diffère sur bien des points de celui de l’édition princeps, par suite de modifications introduites dans les éditions nouvelles, mises au jour, les unes, du vivant, et les autres, après la mort de l’auteur.

Si l’on confère, même superficiellement, les deux gros