Page:Barckhausen - Montesquieu, l’Esprit des lois et les archives de La Brède, 1904.djvu/70

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à cet âge qu’ils appelèrent le tems de la puberté, parce qu’ils infligèrent des peines plus grandes pour les crimes commis après cet âge, que pour ceux commis auparavant, et cela paroît par la Loi des XII Tables[1]. Elle vouloit que celui qui étoit surpris en un vol manifeste fut battu de verges et réduit en esclavage, s’il étoit pubère ; et qu’il fut seulement fouetté, comme le jugeroit le préteur, s’il étoit impubère.

On demandera peut-être : si les Romains avoient fixé l’âge de raison à la puberté, pourquoi ils punissoient les crimes avant la puberté ? C’est que les enfans sont très capables de correction. Moins ils ont une raison formée, plus il est naturel qu’on les corrige. Il faut bien qu’ils soient capables de correction, puisque les bêtes mêmes le sont. Tout ce que l’équité demande dans ce cas, c’e[st] qu’on les punisse avec plus de modération, et c’est ce que la Loi des XII Tables observa très bien.

Quand la Loi n’a rien statué sur les crimes des impubères, il me paroit que l’équité demande qu’on observe deux choses : Pune, que le Magistrat n’inflige à peu près que la punition que le père ou le tuteur infligeroit lui-même ; l’autre, qu’une grande peine ne doit leur être infligée que dans le cas où l’action marque même l’usage de la raison dans la manière dont on l’a faite, et non pas dans ceux où l’on ne voit que l’enfance même.

Il paroit aussi, à l’égard des affaires civiles, que les loix romaines fixèrent l’âge de raison au tems de la puberté, puisque ce fut à cet âge qu’ils firent cesser l’autorité des tuteurs, qui étolent donnés à la personne du pupile, et que c’est à cet age que commençoit l’administration du curateur, qui étoit établi pour régir les biens.

Les législateurs romains fixèrent donc deux époques : l’âge de raison, à la puberté ; et l’âge de la maturité de la raison, au tems de la majorité, c’est-à-dire à vingt-cinq ans.

Tous les législateurs n’ont pas, comme les Romains, distingué ces deux époques, et plusieurs n’en ont établi qu’une, après

  1. En marge : « Dans la suite, le préteur abolit les peines de cette loi et se contenta de condamner au quadruple le voleur manifeste, Favorinus, dans Aulu-Gelle, loue beaucoup la douceur du Peuple romain à cet égard. — Aulu-Gelle, l. 20, ch. i. »