Page:Barine - Alfred de Musset, 1893.djvu/173

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qui a été dit avec tant de bon sens[1] sur les dangers de l’influence littéraire des salons et des femmes. Musset a beaucoup trop vécu de la vie de salon et dans la société des femmes. A force de rimer des bouquets à Chloé pour ses « petits becs roses » et de rechercher les applaudissements de leurs « menottes blanches », il s’est déshabitué des pensées et des efforts virils au moment où c’était pour lui une question de vie et de mort.

Ses journées furent un tissu de néants lorsqu’il cessa de les donner au travail. Ses lettres en font foi. Les événements de ces longues années sont quelques petits voyages et beaucoup de passions pour rire. En 1845, il passe une partie de l’été dans les Vosges. A son retour, il écrit au fidèle Tattet : « Rien n’élève le cœur et n’embellit l’esprit comme ces grandes tournées dans le royaume. C’est incroyable le nombre de maisons, de paysans, de troupeaux d’oies, de chopes de bière, de garçons d’écurie, d’adjoints, de plats de viande réchauffés, de curés de village, de personnes lettrées, de hauts dignitaires, de plants de houblon, de chevaux vicieux et d’ânes éreintés qui m’ont passé devant les yeux…. »

« Je suis revenu avec une jeune beauté de quarante-cinq à quarante-six ans, qui se rendait, par les diligences de la rue Notre-Dame-des-Victoires, de Varsovie aux Batignolles. Le fait est

  1. M. Brunetière, l’Évolution des genres.