Page:Barneville - Le Rythme dans la poésie française, 1898.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tel mépris toutes les jeunes écoles ? Je ne le croîs pas, car, à côté de délirantes absurdités, elles ont du bon, de l’excellent. Leurs programmes sont-ils donc si déraisonnables ? Liberté plus grande dans la distribution des césures, enjambements fréquents, assonances, allitérations, rimes insexuées, coupes ternaires, mètres impairs, toutes ces réformes, on l’a vu, peuvent avec du tact être tentées sans que pour cela nous sortions de nos traditions nationales. Et là est l’important. Il n’y a point ici de question de principe ; il n’y a qu’une question de pratique[1], et l’on

  1. La poésie a une existence propre, qu’il n’appartient à personne d’immobiliser, et sa forme, comme la forme même de la langue, est susceptible, au cours des âges, de multiples modifications. « Le vers, a-t-on dit, est un organisme soumis aux conditions qui sont celles mêmes de la vie, et poursuivant sans relâche son évolution. Les belles œuvres peuvent le fixer pour un temps : elles accélèrent, elles retardent, et parfois elles contrarient sa marche régulière ; elles ne l’arrêtent pas. De même, le plaisir spécial qu’il nous procure, en dehors de tout élément intellectuel, n’est qu’un effet de l’habitude. Notre oreille peu