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AFFAISSEMENT

… À dix minutes de marche, il sait un endroit certainement plein de camarades. On arrive, on est surpris et illuminé de se revoir ; on se serre cordialement la main, chacun selon son tic (deux doigts avec nonchalance, ou cordialement en camarade loyal, ou d’une main humide, ou sans lever les yeux à l’homme préoccupé, ou en disant : « mon vieux  »). Puis quoi ! les bavardages connus, les doléances, de petites envies. Auprès de ces braves gaillards, identiques hier et demain, je n’irai pas risquer ma quiétude. Tandis que les muscles de leurs visages et les secrètes transitions de leurs discours révèlent qu’ils mettent leur honneur et leur joie dans les médiocres sommes et faveurs où ils se hissent, ils n’arrêtent pas de stigmatiser, avec emportement et naïveté, les concessions de leurs aînés. Le plus agaçant est que, cramponnés