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1614. janvier.

ral[1] de France en intention d’estre proveu en sa place de celle de colonel general, mais que feu Mr le comte de Soissons, quy le haïssoit[2], porta les Suisses, au renouvellement de l’alliance avec le feu roy, de demander que ce fut un prince quy fut leur colonel general, et que Mr de Suilly avoit porté le roy a nommer Mr de Rohan pour cet effet, et qu’il avoit escrit ausdits Suisses qu’ils le devoint recevoir en cette qualité puis qu’il l’estoit du sang de deux royaumes desquels il pouvoit heriter, assavoir de Navarre et d’Escosse[3]. Sur ces raysons, la reine desista de me proposer pour cette charge et leur nomma le chevalier de Guyse, et le mesme Mr de Villeroy continuant son premier dessein : « Cette election donnera bien a crier et un specieux pretexte a ceux quy veulent brouiller et quy se plaignent desja de la faveur que vous faites a ceux de cette mayson a leur prejudice. » Sur cela le conseil se leva, la reine leur disant : « Il faudra donc penser a quelqu’un quy soit propre pour cela. »

Comme elle fut revenue a son cabinet, elle me dit : « Bassompierre, sy vous eussiés esté prince, je vous eusse donné aujourd’huy une belle charge » Je luy respondis : « Madame, sy je ne le suis, ce n’est pas que

  1. Les précédentes éditions portaient : maréchal.
  2. Qui haïssait M. de Sancy.
  3. M. de Rohan était petit-fils d’Isabelle d’Albret, fille de Jean d’Albret, roi de Navarre, et grand’tante de Henri IV. Ses droits éventuels sur le royaume d’Écosse étaient plus éloignés : Anne de Rohan, sa bisaïeule, était petite-fille d’Isabelle Stuart, fille de Jacques Ier, roi d’Écosse.