Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/48

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Une bonne législation est donc celle qui atteint le vrai but de puissance protectrice, c’est-à-dire, qui garantit à chacun ses propriétés, sa liberté.

Propriété, c’est le fruit de votre travail, c’est un bien qui vous est propre, parceque vous l’avez crée ou mérité en [54] remplissant quelque fonction d’un des trois arts caractéristiques des sociétés policées, ou parceque vous représentez le légitime acquéreur par son choix et sa volonté. La liberté sociale est relative à ces propriétés. Être libre, c’est « n’être empêché en nulle maniere d’acquérir des propriétés, ni de jouir de celles qu’on s’est acquises, je dis, acquérir, c’est-à-dire mériter à juste titre, non par usurpation. »

La loi naturelle étant de se faire à soi-même le meilleur sort possible, sans attenter à la propriété d’autrui, comme je crois l’avoir prouvé dans un ouvrage à part, (ou pour mieux dire, comme tout le monde le sent au fonds de son ame sans nulle preuve). La liberté sociale, que la justice doit garantir à tous, n’est pas autre chose, quoi qu’en aient écrit de grands Philosophes.

On a dit que cette liberté sociale consistoit « à ne pouvoir être forcé de faire [55] une chose que la loi n’ordonne pas » : cette définition, pour être bonne, exige qu’on y ajoute le principe fondamental de toute loi, sans aucune exception, et le voici.

Le premier objet de la loi est la propriété, la liberté d’un chacun ; c’est à vous conserver, à vous garantir propriété et liberté, que le souverain doit pourvoir par la loi.

Le second objet est l’usurpation et l’usurpateur ; c’est ce qu’il faut empêcher et réprimer.

Quel est le propriétaire ? Quel est l’usurpateur ? C’est la premiere question qui se présente à résoudre dans tout jugement.

Or l’attribution des propriétés n’est jamais arbitraire ; elle a un titre naturel, c’est ou le travail qui a mérité le bien dont la jouissance est réclamée, ou la transmission du légitime acquéreur.

On croit trop souvent que les loix [56] civiles sont attributives des propriétés, et qu’elles ont de même la force de donner aux actions des hommes leur caractere moral de bien ou de mal : ce sont deux erreurs très fécondes en conséquences pernicieuses.

Delà ces prétendues loix si nombreuses, si compliquées, si contradictoires, si mobiles, qui ont tant couté à faire et à maintenir, et qui ont passé rapidement d’âge en âge, malgré tous les efforts de l’autorité trompée.