Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T02.djvu/122

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
112
ANGLUS.

quòd evidentiam jactet, cùm tamen perobscurè ipsum scribere, quotquot eum legant, queritentur. Respondet ille, se brevitati scientiarum traditoribus aptæ studere ; theologos in causâ esse quòd obscura maneant ipsius scripta, dùm sese explicandi ansam præbere refugiunt. Addit vel doctos eum intelligere posse ; undè et, si errores scribat, ipsum confutare in proclivi est ; vel non intelligere, et sic neque debere ipsi occlamitare ; cùm pessimus sit animi morbus calumniari quod nescis. Il y a quelque chose de sophistique dans ce dilemme.

(E) Quelques-uns de ses ouvrages ont été flétris par la congrégation de l’index et par les censures de diverses académies. ] Le décret de cette congrégation du 10 juin 1658 condamna ces quatre traités de Thomas Anglus, Institutiones peripateticæ ; Appendix theologica de Origine mundi ; Tabula suffragialis de terminandis fidei litibus ab Ecclesiâ Catholicâ fixa ; Tesseræ romanæ evulgatio. Les deux dernières pièces furent publiées contre le fameux père Macedo, qui, dans les guerres de plume, a été un véritable chercheur d’occasions, un chevalier errant toujours prêt à rompre une lance. Il attaqua Thomas Anglus [1] ; mais au lieu de répliquer au Tabulæ suffragiales et au Tesseræ romanæ evulgatio, qu’on avait opposés à son attaque, il recourut à des intrigues, qui firent condamner ces pièces par la congrégation de l’index [2]. Les docteurs de Douai censurèrent vingt-deux propositions extraites des Instructions sacrées de Thomas Anglus. Il opposa à leur censure une Supplicatio postulativa justitiæ, où il se plaignit qu’ils se fussent contentés d’une censure très-vague, accompagnée d’un respectivè, sans qualifier chaque proposition en particulier [3]. Il leur montre que c’est agir en théologiens prévaricateurs. Et en effet, ne jette-t-on point par-là tous les simples dans le péril de se tromper et de calomnier leur prochain ? Si vous prononcez en général, sur trente propositions, qu’elles sont respectivement téméraires, dangereuses, hérétiques, où sera l’homme que vous n’exposiez à prendre pour hérétique ce qui n’est que téméraire, ou pour téméraire seulement ce qui est hérésie en toute rigueur ? Cette réflexion aura plus de force, si je l’emprunte de la lettre d’un anonyme, qui paraît homme d’esprit et de jugement. Voici donc comme il parle sur le décret de l’inquisition du 7 décembre 1690, contre trente et une propositions. « Je ne sais, monsieur, dit le prélat en s’adressant au docteur, si vous avez bien compris toute l’adresse et tout l’artifice de la censure. Vous savez la manière dont ces messieurs ont accoutumé de qualifier les propositions, non en leur donnant à chacune en particulier leur note et leur qualité, soit de scandaleuse ou d’erronée, ou autre ; mais en mettant d’abord de suite toutes les propositions, y en eût-il cinq cents : et après, sous ces propositions en bloc et en tas, toutes les qualifications qu’il leur plaît de leur donner, en y ajoutant un respectivè au bout. De sorte que c’est aux théologiens particuliers à deviner quelles de ces propositions sont condamnées seulement comme scandaleuses et quelles le sont comme hérétiques ou d’une autre manière [4] ». Dans la page suivante, on introduit un conseiller au parlement, qui s’exprime ainsi : « Surtout, nous croirions nous moquer de la justice et nous exposer à la risée et à l’indignation publique, si nous mettions dans nos arrêts, d’une part, toutes les prétentions des parties et tous les chefs d’un procès, et de l’autre, confusément et en un tas toutes les décisions différentes avec un respectivè qui rendrait l’arrêt inintelligible, et serait une source de mille procès éternels. » Voyez les réflexions qu’a faites sur ce même décret d’Alexandre VIII, l’auteur des Difficultés proposées à M. Steyaert [5]. Je reviens à Thomas Anglus. Il forma plusieurs doutes sur chaque censure des théologiens de

  1. Il publia, en 1654, Sonus litui adversùs Sonum tubæ. Thomas Anglus avait publié, en 1653, Sonus buccinæ, cum Appendice adversùs mentem divinitùs inspiratam lnnocentio X.
  2. Voyez la préface du livre intitulé Statera appensa quoàd salutis assequendæ facilitatem, imprimé à Londres, en 1661. in-12
  3. Voyez la même préface.
  4. Lettre d’un abbé à un prélat de la Cour de Rome, pag. 29. Le titre de mon édition porte Jouxte la copie imprimée à Thoulouse, 1691.
  5. Diffic., à Steyaert, IXe. part., pag. 249.