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ANICIUS.

Douai ; et prétendit que, si l’on n’y satisfaisait pas, on couvrirait de confusion l’académie et on le comblerait de gloire [1]. Lorsque la cabale a plus de part que la raison aux censures d’un ouvrage, le particulier censuré ne manque guère de confondre ses censeurs. On n’a qu’à se souvenir de la lettre que M. Arnauld écrivit en 1683 à l’université de Douai.

Je n’ai pas encore dit tout ce que je sais des censures qui tombèrent sur les livres de Thomas Anglus. Dès que sa Statera Morum eut paru, l’archevêque de Malines et l’évêque d’Anvers en firent des plaintes à l’internonce de Bruxelles. Il y eut un important qui passa en Angleterre, pour extorquer des signatures contre la doctrine de cet auteur [2] ; et il paraît que l’évêque de Chalcédoine désapprouva le traité de medio Animorum statu, et qu’on fit courir le bruit qu’il l’avait censuré publiquement [3].

Le père Baron observe que le Sonitus buccinæ fut censuré, et que l’auteur y soutient que l’église n’a pas le pouvoir de définir, mais seulement de témoigner sur la tradition [4].

(F) Il n’aurait pas été fâché que les jésuites l’eussent jugé digne de leur colère. ] Cela paraît par la préface que j’ai tant de fois citée [5]. L’auteur de cette préface et du livre qui la suit, n’est peut-être pas différent de Thomas Anglus. Il écrivit peut-être lui-même contre sa Statera Morum, tant pour avoir lieu d’éclaircir des difficultés, que pour engager le public à prendre garde à un livre qui courait risque de n’être point démêlé de la foule des livres nouveaux. En tout cas, l’auteur de cette préface n’est pas un homme qui paraisse mal instruit des pensées de Thomas Anglus, ni mal intentionné contre lui. Or, voici ce qu’il dit touchant les jésuites : Increbuerunt sæpiusculè rumores comminatam esse doctam illam societatem se contra D. Albii Opera stricturam calamum. Hoc idem ab iis maximè exspectabant omnes, ut quos præcipuè ac penè unicè scriptis suis lacessiverat. Attamen, sive ex motivis prudentialibus suppressi sint libri illi jam scripti, sive nulli omninò scripti fuerint, nihil dum editum est. Hic triumphat maximè D. Albius, et causam suam hoc discursu tueri solet : Minas illas quas intentabant, clamores quibus ipsi passim obstrepebant manifesta esse indicia non defuisse voluntatem illum confutandi : Neque eo genio esse PP. Societatis ut quicquam famâ suâ charius habeant ; undè evidenter constare solam iis defuisse potentiam, postquàm ad tam insignem ignominiam propellendam adeò tardi extiterint. Vous voyez là un homme qui, n’ayant pu avoir la gloire d’être commis avec les Jésuites, se prévaut de leur silence et se dédommage en l’imputant à leur faiblesse, et non pas à leur insensibilité.

  1. Præfat. Stateræ, etc. Voyez la citation (6).
  2. In eâdem Præfat. Stateræ.
  3. Voyez l’Épître dédicatoire du livre de Thomas Anglus, intitulé Vellicationis suæ de medio Animarum statu ratio, imprimé l’an 1653.
  4. Baro, Apologiæ lib. IV, pag. 144.
  5. Præfat. Stateræ appensæ, etc. Voyez la citation (6).

ANICIUS, famille romaine. Elle a été plus illustre sous les empereurs chrétiens, qu’au temps de la république, quoiqu’elle ait produit des consuls, avant que Jules-César fût au monde. On voit dans Plineun Q. Anicius Prænestinus, qui fut créé édile curule dans le Ve. siècle de Rome [a]. L. Anicius Gallus fut préteur au siècle suivant, savoir l’an 585, et commanda dans l’Illyrie avec tant de bonheur, qu’il ne mit qu’un mois à la conquérir (A), et à faire prisonnier le roi Gentius. L’honneur du triomphe lui fut accordé l’année suivante [b]. L’un des consuls de l’an 593 avait nom L. Anicius Gallus. Je ne trouve sous les premiers empereurs, qu’Anicius Cerealis, qui était consul désigné l’an de Rome 818 [c]. Il se trouva enveloppé dans

  1. Plinius, lib. XXXIII, cap. I.
  2. Voyez Sigonius de Fastis Roman.
  3. Tacitus, Annalium lib. XV, cap. LXXIV.