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ARÉTIN.

saint Jean, et une vingtaine d’Homélies du même père. Il traduisit aussi en latin les Lettres de Phalaris (A). On a encore de lui un traité de Balneis Puteolanis [* 1]. Jean Antoine Campanus, qui fut en faveur auprès de Pie II et de Sixte IV, était l’un de ses intimes amis [a]. Érasme n’estimait point le travail de notre Arétin sur saint Chrysostome (B).

Quelques-uns croient que notre François Arétin ne diffère pas du fameux jurisconsulte Franciscus Aretinus, qui était de la famille des Accolti. Mais d’autres ont de la peine à s’imaginer que le traducteur de quelques ouvrages de saint Chrysostome, etc., soit le même que François Accolti, dont les ouvrages de jurisprudence respirent la plus grossière barbarie, sans aucune ombre de la connaissance du grec. J’ai des observations à produire là-dessus, qui pourront convaincre bien des gens qu’il n’y a ici qu’un seul François Arétin (C). Quoi qu’il en soit, parlons d’Arétin le jurisconsulte. Il étudiait à Sienne, environ l’an 1443 [b], et puis il y enseigna la jurisprudence avec une telle vivacité de génie, qu’on le surnomma le prince des subtilités, et que la subtilité d’Arétin passa en proverbe. Il faisait principalement éclater ce beau talent dans les disputes ; car personne ne lui pouvait résister. Il donnait ses conseils avec tant de confiance, qu’il assurait les consultans qu’ils gagneraient leurs procès. L’expérience ne lui fut pas contraire, puisqu’on disait ordinairement dans le barreau, une telle cause a été condamnée par l’Arétin, elle sera donc perdue. Il enseigna aussi dans l’académie de Pise, et dans celle de Ferrare. Il fut à Rome sous le pontificat de Sixte IV, et ne s’y arrêta pas long-temps ; car il vit bientôt que les grandes espérances qu’il avait bâties sur sa réputation seraient nulles. Ce pape déclara qu’il lui donnerait volontiers la dignité de cardinal, s’il ne craignait de faire tort au public, en ôtant à la jeunesse un si excellent professeur. Lorsque la vieillesse ne lui permit plus de remplir toutes les fonctions de sa charge, il fut dispensé de faire leçon, et on lui continua ses gages. Il ne laissa pas de monter quelquefois en chaire ; et, quoique ses leçons fussent sans force, il avait néanmoins beaucoup d’auditeurs : on donnait cela à sa renommée. Un jour que les étudians étaient accourus à des spectacles, il s’aperçut qu’il n’y avait que quarante personnes dans son auditoire, et il s’en fâcha tellement qu’il jeta son livre, et qu’il se mit à crier, jamais l’Arétin n’expliquera la jurisprudence à peu de monde. Il se retira tout en colère, et ne voulut plus enseigner. Il était d’un naturel sévère, et il ne garda jamais plus d’un mois ou deux le mème valet : Ceux qu’on a loués depuis peu servent beaucoup mieux,

  1. * Joly, d’après la Bibl. Manuscriptorum nova de Montfaucon, dit que Fr. Arétin a encore laissé, 1°. des Lettres ; 2°. une traduction des Lettres de Diogène le philosophe ; 3°. une version de l’Odyssée d’Homère.
  1. Tiré d’Aubert le Mire, Auctar. de Scriptor. Ecclesiast., pag. 268.
  2. Panzirol. de Clair. Lezum interpretib., lib. II, cap. CIII, pag. 249 et seqq.