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ARÉTIN.

disait-il. On l’honora de la qualité de chevalier, et il passa toute sa vie dans le célibat, et dans une épargne qui lui donna lieu d’amasser beaucoup de richesses. Il ne fut pas moins honoré à cause de sa chasteté, qu’à cause de son érudition. On sera bien aise de savoir la ruse dont il se servit pour apprendre à ses disciples combien il importe de passer pour honnête homme (D). Quoiqu’il eût destiné ses biens à l’entretien d’un collége, il les laissa à ses parens [a]. Il avait un frère qui se rendit fort illustre sous le nom de Benedictus Accoltus Aretinus (E). J’en parlerai dans une remarque.

  1. Tiré de Panzirole, de Claris Legum Interpretibus, lib. II, cap. CIII, pag. 249 et seqq.

(A) Il traduisit en latin les Lettres de Phalaris. ] J’ai vu, dans un livre imprimé en Allemagne l’an 1689 [1], plusieurs curieuses recherches touchant ces Lettres ; mais je ne puis m’empêcher de dire qu’on attribue à Léonard Arétin ce qui n’est dû qu’à François : Latinè emisit Leonhardus Aretinus Florentiæ mcccclxxx. Nous verrons en son lieu [2] que Léonard n’était point en vie au temps de cette édition.

(B) Érasme n’estimait point le travail de notre Arétin sur saint Chrysostome. ] Il remarque en deux endroits la faute que ce traducteur avait faite sur le mot οἴησις, dans la version du Commentaire sur la Ire. épître aux Corinthiens : Quod attinet ad fidem benè reddendi Græca, magis peccatum est ab Aniano, Aretino, et cæteris, quam ab Œcolampadio, qui magis peccat festinatione quàm imperitiâ, Versionem Francisci Aretini in priorem ad Corinth. habemus usque ad cap. 30. Cepi gustum quàm scitè tractâsset rem, et ecce in ipso statìm limine, quod est τὸν τύϕον κατέϐαλε καὶ χαμαὶ ἔῥῥιψε πᾶσαν αὐτῶν οἴησιν, οἴησιν opinionem vertit pro arrogantiâ [3]. Il remarque en un autre lieu [4] qu’Arétin avait achevé de traduire les Commentaires sur la Ire. épître aux Corinthiens, jusqu’à la XXe. Homélie.

(C) J’ai des observations à produire...., qui pourront convaincre...... qu’il n’y a ici qu’un seul François Arétin. ] Proposons d’abord le doute de Panzirole : Liberalibus artibus imbutus non solùm latinis, sed etiam græcis litteris operam dedisse creditur, et Joannis Chrysostomi in D. Joannem et Epistolam primam Pauli ad Corinthios Commentaria latina fecisse ; vereor tamen ne is sit Accoltus, cum quæ in jure scripsit, illum stylum non oleant, neque ullum servent linguæ græcæ vestigium [5]. Puis voyons ce que M. de la Monnoie m’a écrit sur ce doute-là [6]. « François Accolti d’Arezzo ayant écrit ses conseils, et ses autres ouvrages de jurisprudence, d’un style qui témoigne non-seulement une entière ignorance du grec, mais aussi du latin, j’ai douté comme Panzirole que ce fût ce même François d’Arezzo qui nous a donné des versions du grec, la diction desquelles ne cède point à celle de la plupart des autres humanistes de son temps. Je voyais que le jurisconsulte prenait le nom d’Accolti et les qualités de docteur et de chevalier, au lieu que l’humaniste était simplement nommé Franciscus Arétinus. Cependant, ayant eu depuis peu communication d’un exemplaire des Épîtres de François Philelphe imprimées à Venise, in-folio, l’an 1502, édition très-rare et plus ample que les autres de XXI livres, j’y ai trouvé de quoi revenir de mon doute, par la lecture de plusieurs de ces Épîtres, où l’auteur parle d’un François d’Arezzo son disciple, savant également dans le droit et dans les belles-lettres. Le temps et les circonstances font connaître évidemment que c’est celui dont

  1. Decas Decadum Joh. Alberti Fabricii, num. 8.
  2. Dans la remarque (G) de l’article de (Léonard) Arétin.
  3. Erasm., Epist. LIX, lib. XXVI, pag. 1478. Voyez aussi Epistolâ IV, lib. XXVIII, pag. 1591.
  4. Pag. 1591.
  5. Panzirol., de Claris Legum Interpret., lib. II, cap. CIII, pag. 249.
  6. M. de La Monnoie, Remarques manuscrit.