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ARIMINI. ARION.

et l’ajuster avec les paroles de Moïse, en supposant que les parties les plus grossières de cet air obscur et épais se précipitèrent sur la circonférence de l’abîme, où ils trouvèrent une écume grasse et gluante, avec quoi elles s’embarrassèrent, pour former ensemble une espèce de limon, qui s’étant durci, devint la terre habitable [1]. Quelques anciens ont dit qu’une colombe, couvant un œuf, avait produit Vénus ou l’Amour. Verba citat Grotius ex Nigidio in Scholiasten Germanici, ovum miræ magnitudinis quod volventes ejecerunt in terram, atque ità columbam insedisse, et post aliquot dies exclusisse Deam Syriæ quæ vocatur Venus [2]. Lucius Ampelius a dit que c’était un œuf de poisson : Ovum piscis columbam adsedisse dies plurimos, et exclusisse Deam Benignam [3]. Le docteur Burnet entend le chaos par l’œuf, le Saint-Esprit par la colombe, et la Terre par Vénus [4]. Mais il semble qu’il ne faudrait pas borner à la seule production de la Terre cette Vénus qui sortit de l’œuf : il faudrait entendre toute la machine du monde. Ce docteur remarque que l’œuf était une chose fort sacrée dans les mystères de Bacchus, à cause de sa conformité avec l’être qui engendre et qui enferme tout en lui-même : Ὡς μίμημα τοῦ τὰ πάντα γεννῶντος καὶ περιέχοντος ἐν ἑαυτῷ [5]. Il n’oublie pas d’observer que l’expression de Moïse à du rapport à l’action des poules qui couvent : Huic doctrinæ de ovo mundano datæque interpretationi tacitè favere mihi videtur incubatio Spiritûs Sancti in abyssum, de quâ Moses in primâ telluris productione, ubi ad ovum manifestò alluditur [6].

(B) Les Perses considéraient Arimanius comme une divinité, qui ne se plaisait qu’à faire du mal. ] Si l’on voulait me nier cela, on me pourrait objecter que le roi de Perse eut un grand plaisir d’avoir gagné Thémistocle ; il croyait donc que ce serait une très-bonne fortune pour son pays, que de telles gens fussent exilés par leur patrie, et qu’ils se réfugiassent à sa cour : lors donc qu’il priait Arimanius d’inspirer à ses ennemis la résolution de bannir leurs plus braves citoyens, il lui demandait une grâce très-insigne ; et par conséquent, il le regardait comme une cause bienfaisante en quelques rencontres à l’égard des Perses. Je réponds que c’est un raisonnement qui ne prouve point ce qu’on veut prouver. Ce monarque ne s’écartait pas des idées de ses théologiens : il ne considérait Arimanius que comme un être malfaisant : il ne lui demandait l’exil des grands hommes de la Grèce, qu’en tant que cela était préjudiciable à ce pays-là. C’était une action du ressort et du goût d’Arimanius, en tant qu’elle était injuste et pernicieuse par rapport aux villes qui exilaient : mais en tant qu’elle procurait du bien aux Perses, elle ne lui était pas agréable ; et ce n’était point sous cette notion qu’on le priait d’y travailler. En un mot, pour résoudre cette objection, il suffit de dire que les choses de ce monde étant si mêlées, qu’ordinairement parlant un pays profite du malheur de l’autre, Arimanius ne pouvait presque rien faire qui fût purement et simplement pernicieux : il en résultait toujours quelque utilité, ou par accident, ou de quelque autre manière. Mais comme il ne faisait une chose qu’à cause du mal qu’il y voyait, on ne peut pas prétendre qu’il fût le principe d’aucun bien. Il eût empêché, s’il l’eût pu, que les Perses ne trouvassent quelque avantage dans le préjudice d’Athènes. Il est donc vrai que la prière, dont nous parlons, ne prouve pas qu’on le regardât autrement que comme un être qui ne se plaisait qu’à nuire.

  1. C’est ce que fait le docteur Burnet, même, pag. 244.
  2. Id., ibid, pag. 259.
  3. Idem, ibid.
  4. Idem, ibid.
  5. Ex Plutarchi Sympos., lib. II, Qu. III, pag. 636.
  6. Burnet., Telluris Theoria sacra, pag. 286.

ARIMINI (Grégoire d’). Cherchez Rimini.

ARION, cheval admirable, et tout autrement fameux dans l’histoire poétique, que Bucéphale dans l’histoire d’Alexandre. On parlait diversement de son origine, quoiqu’on s’accordât à lui donner du divin. Les uns di-