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ARIUS.

fit en convoquant le concile de Nicée, qui condamna la doctrine d’Arius, l’an 325. Cet hérésiarque fut exilé par l’empereur, qui voulut de plus que tous ses livres fussent brûlés, et que quiconque aurait la hardiesse de les garder fût puni du dernier supplice (A). Quelques-uns prétendent qu’Arius, ayant abjuré son hérésie en présence du concile, évita la peine du bannissement (B) ; mais d’autres soutiennent qu’il fut exilé (C), et que l’empereur ne le rappella qu’au bout de dix ans [a] (D). Ils content que l’on fit accroire à ce prince, qu’Arius était au fond orthodoxe : ils ajoutent que Constantin s’étant confirmé dans cette pensée, par la profession de foi que cet homme lui présenta, écrivit en sa faveur aux évêques qui étaient assemblés à Jérusalem pour la dédicace du temple ; que les évêques qui se trouvèrent encore dans cette ville lorsqu’Arius y arriva avec la lettre de Constantin, étaient pour la plupart ariens cachés ; qu’ils ne manquèrent donc pas de prononcer que sa doctrine était orthodoxe, et de le recevoir à la communion de l’église ; que, pour remporter un plein triomphe, ils s’imaginèrent qu’il fallait qu’Arius fût réhabilité dans Alexandrie, où il avait reçu les premiers coups de l’anathème ; et que comme saint Athanase, qui en était patriarche, et qui était le grand adversaire d’Arius, avait été relégué, ils crurent qu’en son absence il serait facile de rétablir Arius dans la communion de l’église d’Alexandrie, mais qu’ils se trompèrent ; que le peuple ne l’y voulut jamais admettre ; que Constantin, averti de la continuation des troubles, fit venir Arius à Constantinople, et obtint de lui, sans aucune difficulté, la signature du concile de Nicée ; qu’ensuite il le renvoya aux évêques, qui étaient alors assemblés à Constantinople ; qu’il le leur renvoya, dis-je, afin qu’ils le reçussent à la communion dans cette ville impériale ; que celui qui en était évêque ne voulut jamais y consentir, quoiqu’on lui représentât qu’Arius avait signé tout ce qu’on avait voulu ; qu’Eusèbe n’eût pas laissé nonobstant cela de faire rendre la communion ecclésiastique à son ami dans la grande église de Constantinople ; qu’il l’y menait comme en triomphe, accompagné d’une grande troupe de ses partisans, mais que, comme on approchait de la grande place, Arius, pressé d’une nécessité naturelle, se retira à la hâte dans un lieu public, et y mourut sur-le-champ, tous ses intestins s’étant écoulés avec son foie et avec sa rate, l’an 336 [b]. De fort savans hommes rejètent cette chronologie (E). La secte d’Arius ne mourut pas avec lui, elle a subsisté assez long-temps, et avec éclat, en divers pays du monde. On ne saurait assez admirer qu’un ministre, qui passe pour fort habile, ait ignoré un fait si notoire (F). Il en a ignoré un autre qui n’est pas moins évident ; car il a débité

  1. Voyez l’Arianisme du père Maimbourg, liv. I et II.
  2. Tiré de l’Arianisme de Maimbourg, liv. I et II.