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ARRERAC. ARRIA. ARRIAGA.

vos âmes, à ces vies de vos vies, à ces vies de vos cœurs et de vos âmes, à ces âmes de vos vies et de vos cœurs, que le monde n’entend pas : car vous êtes ces spirituels, qui jugez tout le monde, voire les anges, à plus forte raison les Romains, sans pouvoir être jugés de personne. Je ne sais qui lui en a tant appris, et ne puis pas répondre de ceux qui ont des femmes à la dérobée. Mais un personnage grave, qui vit en un chaste mariage, ne s’étudie point à une si extravagante rhétorique. Le prélat répliqua d’une façon si burlesque que rien plus [1].

  1. Voyez sa Réponse à l’Avant-Coureur de M. Drelincourt, pag. 156.

ARRERAC (Jean d’), conseiller au parlement de Bordeaux, vers la fin du XVIe. siècle, est auteur d’un livre dont je parlerai ci-dessous (A).

(A) Il est auteur d’un livre dont je parlerai ci-dessous. ] Il a pour titre : la Philosophie civile et d’état, divisée en l’Irénarchie et la Polémarchie, et fut imprimé à Bordeaux, par Simon Millanges, l’an 1598, in-8o. Il devait comprendre deux tomes, dont je n’ai vu que le premier [1]. Voici l’idée que l’auteur en donne [2] : « J’ai pris mon sujet sur les lois du premier livre des Pandectes, que tous les docteurs ont méprisées, ou pour ne les avoir pas entendues, ou parce qu’ils ont cru qu’elles ne servaient pas de beaucoup à la chicane, de laquelle ils étaient plus esclaves pour le quête qu’ils en espéraient, qu’amoureux de la vertu et de l’honneur. Je trouve ce livre si riche et si plantureux de belles lois, que je me trompe fort, si je ne montre dans le mien, qu’il contient la plupart des lois de la nature et de la philosophie morale et civile, avec l’ordre des magistratures et juridictions romaines. J’ai ajouté à ce premier livre les deux premiers titres du second, sur lesquels j’ai discouru des droits de juridiction, tant selon la police romaine, que notre droit français et le droit de l’Église, et de cette loi de nature, quod quisque juris in alium statuerit, ut ipse eodem jure utatur. » Cela regarde le premier tome, ou l’Irénarchie, c’est-à-dire, l’état de paix : ce qui suit concerne sa Polémarchie, c’est-à-dire, l’état de guerre. C’était un petit volume, lequel contenait en quatre livres toutes les qualités et perfections d’un chef d’armée, les ruses et stratagèmes des anciens capitaines, les moyens de nous servir des occurrences en la guerre, et de nous maintenir vainqueurs après la victoire obtenue [3]. Cet auteur avait beaucoup lu, et n’était pas chiche de citations, mais ordinairement, il ne s’étend guère sur chaque chose : c’est pourquoi il a eu assez de place pour parler d’un fort grand nombre de sujets. Il combat assez souvent les plus célèbres jurisconsultes, Accurse, Alciat, Budée, Cujas, etc. ; et de temps en temps, il fait des observations bien singulières.

  1. Il contient 721 pages.
  2. Jean d’Arrerac, Épître dédicatoire au cardinal de Joyeuse.
  3. Jean d’Arrerac, Épître dédicatoire, pag. 1, vers la fin.

ARRIA, ou Arrie, nom de quelques dames romaines, dont je parlerai dans les remarques de l’article Pétus [* 1].

  1. * L’article Pétus n’ayant pas été donné par Bayle, ses traducteurs anglais ont composé un article Arria que Chaufepié a reproduit dans son Dictionnaire, en y ajoutant une longue remarque contre le suicide, sujet qu’il reproche à Bayle de ne pas avoir traité assez directement, quoiqu’il en eût de belles occasions. Voyez les articles Lucrèce (remarque D), et Zia (remarque C.)

ARRIAGA (Roderic de), jésuite espagnol, naquit à Lucrone, le 17 de janvier 1592. Il entra dans la société le 17 de septembre 1606, et enseigna la philosophie avec un grand applaudissement à Valladolid, et la théologie à Salamanque ; et ayant appris par des lettres du général de la compagnie, qu’il serait de la plus grande gloire de Dieu que quelques jésuites espagnols