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ATHÉNÉE.

1514. Marc Musurus, Grec de nation, l’assista de ses soins et de ses lumières. Cependant comme ils n’avaient pas de bons manuscrits, et qu’ils n’eurent pas l’exactitude nécessaire en corrigeant, il demeura une infinité de fautes dans leur travail. L’édition de Bâle, qui suivit celle-là, en 1535, apud Joannem Valderum, in-folio, par les soins de Jacques Bedrot, et de Christien Herlinus, ne valut pas mieux. Natalis Comes osa bien se hasarder à mettre en latin Athénée. Personne n’ignore qu’il avait de l’érudition. On connaît par sa Mythologie qu’il avait fort lu et fort étudié ; mais comme il n’entendait rien dans la critique, il est certain que sa traduction est du dernier pitoyable. C’est la première qui ait été publiée. Ante omnes alios (nam de Sangâ Romano vereor ut credendum sit Paulo Jovio,) latinum fecit Athenæum [1]. Quamvis rumor spargeretur Sangam patricium romanum, virum, ut aiunt, eximiæ doctrine, id præstitisse [2]. Casaubon ne marque pas en quel endroit Paul Jove a dit cela : c’est au livre de Piscibus romanis. Voici ses paroles : Sanga Romanus, poëta lepidus, cujus beneficio Athenæum Latinum legimus [3]. Mais ces cinq dernières paroles ne se trouvent point à l’édition de Bâle, en 1561, per Henricum et Petrum Pernam, ce qui montre que Paul Jove avait reconnu qu’il s’était trompé. Dalechamp, médecin célèbre, donna une seconde traduction, qui vaut mieux que celle de Natalis Comes, et qui aurait pu être beaucoup meilleure qu’elle n’est, si l’auteur avait eu moins de pratique. Mais comme il s’attachait à sa profession, et qu’il ne donnait à Athénée que le temps que ses malades lui laissaient de reste, il n’a point fait tout ce qu’on pouvait attendre de lui, quoique pendant près de trente années il ait consacré à cela tout le loisir qu’il pouvait trouver [4]. On en est demeuré là. L’édition de Dalechamp, le grec d’un côté, le latin de l’autre, avec le volume des notes de Casaubon, est le meilleur Athénée qu’on puisse acheter. M. l’abbé de Marolles a traduit en notre langue cet auteur grec. Je ne doute pas qu’il n’ait suivi comme son unique modèle la version latine, et qu’il n’ait commis beaucoup de fautes. Je ne connais cet ouvrage que par le Journal des Savans [5]. Il est in-4o., et fut imprimé à Paris, l’an 1680. C’est la première traduction française de l’original, et la dernière composition du traducteur. J’ai ouï dire qu’elle s’est si bien vendue, qu’on ne la trouve presque plus chez les libraires, et qu’elle est d’une cherté excessive [* 1]. Quant à ce qui a été débité touchant une traduction faite par Sanga, voyez ci-dessus les citations (11), (12), et (13).

(E) Quelqu’un avait fait un abrégé de son ouvrage des Dipnosophistes. ] Casaubon avoue de bonne foi que cet abréviateur lui est inconnu, et qu’il n’en connaît, ni le nom, ni le pays, ni le siècle [6]. Il le met néanmoins plus de 500 ans au-dessus de lui, et il est bien assuré qu’il le faut mettre au-dessus d’Eustathius [7], parce qu’Eustathius s’est servi plus d’une fois de l’abrégé d’Athénée préférablement à l’original, ce qui l’a fait tomber dans quelques fautes [8]. Casaubon prétend que cet abréviateur était quelque grammairien, qui entreprit sur Athénée la même chose qu’Hermolaüs avait entreprise sur l’ouvrage d’Étienne de Byzance, et qui mérite qu’en certaines choses on loue son érudition, et qu’en d’autres on blâme son manque d’exactitude [9]. Les manuscrits d’Athénée étaient déjà fort corrompus, quand cet abrégé fut fait. Deux raisons le prouvent : on voit dans l’abrégé plusieurs corruptions semblables à celles de ces manuscrits ; et l’abréviateur avoue qu’il passe certaines choses, parce qu’elles ont été falsifiées [10]. Casaubon avait le manuscrit de l’abrégé [11]. David Hoes-

  1. * Cela n’est plus ; il existe une autre traduction française d’Athénée par Lefebvre de Villebrune, 1785-91, cinq volumes in-4o. : elle n’est pas estimée, étant infidèle et très-mal écrite.
  1. Casaubon., Præf. Animadv. in Athen.
  2. Dalechampius, Epist. dedic. Athenæi.
  3. Paulus Jovius, Piscibus romanis, cap. XXXI, pag. 104, edition. an. 1531, ex officinâ Frobenianâ.
  4. Ex Præfat. Casaubon. in Athenæum.
  5. Du 20 mai 1680.
  6. Casaubon. Animadvers. in Athen., init.
  7. Idem, in Præfat. et in Animadv., pag. 3.
  8. Idem, in Animadv., pag. 1 et 2.
  9. Casaubon. Animadvers., in Athen., pag. 3.
  10. Idem, Præfatione.
  11. Idem, Animadv., initio.