Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T08.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
11
HENRI II.

phin, le 10 d’août 1536, par la mort de son frère aîné. On a vu ailleurs [a] que son épouse fut stérile pendant quelques années ; et qu’ensuite elle lui donna plusieurs enfans. Il persécuta avec la dernière cruauté ses sujets de la religion ; et cependant il forgea lui-même les armes qui les aidèrent le plus efficacement à se maintenir (AA), car il fut cause que les protestans d’Allemagne mirent leurs affaires en si bon état, qu’il leur fut facile d’envoyer de grands secours aux calvinistes de France. La comparaison que l’on a faite entre son règne et les dernières années de François Ier., nous apprend qu’un roi trop enclin à répandre des faveurs est plus préjudiciable à son état, qu’un roi trop enclin à n’en point répandre (BB). Le défaut de Henri II était de mal ménager ses finances : il en pervertit par ce moyen l’administration, et s’endetta prodigieusement (CC). On a mis entre les désordres de son règne le mal que causèrent les poëtes [b]. La polygamie sous les règnes précédens n’était pas un cas pendable ; ce fut Henri II qui commença à la soumettre au dernier supplice (DD). On verra dans d’autres endroits de ce Dictionnaire ce qu’il ordonna contre les mariages clandestins [c], et contre les mères qui font périr leurs enfans [d].

J’ajouterai une chose que j’ai trouvée dans une lettre de Bodin. Le pape Jules III somma ce prince de comparaître devant Dieu, pour répondre du tort qu’il lui faisait de tenir la Mirande. Le roi fit réponse qu’il s’y trouverait ; mais qu’il s’assurait que le pape ne s’y trouverait point [e].

  1. Dans l’article Fernel, remarque (K), tom. VI, pag. 429.
  2. Voyez, tom. VII, pag. 28, la remarque (D) de l’article Garasse, au premier alinéa.
  3. Voyez la remarque (H) de l’article Piene, tom XII.
  4. Voyez la remarque (C) de l’article Patin, tom. XI.
  5. Bodin, dans une Lettre datée de Laon, le 27 de mars 1595, et rapportée par M. Ménage, Remarques sur la Vie d’Ayrault, pag. 250.

(A) Il rappela le connétable de Montmorenci. ] « Son père lui avait sérieusement recommandé qu’il se servît d’Annebaut, dans lequel il avait trouvé beaucoup d’expérience, de sagesse et de zèle, et nulle tache d’avarice ni d’ambition ; mais surtout qu’il se donnât bien de garde, s’il aimait le bien de son état, de rappeler le connétable de Montmorenci....... Néanmoins, quoiqu’il ni eût toute sa vie porté une très-respectueuse obéissance, il ne déféra rien à ses commandemens après sa mort. Il ôta l’administration de toutes les affaires à Annebaut et au cardinal de Tournon, pour la donner à Montmorenci [1]. » Nous allons voir que cette très-respectueuse obéissance eut des exceptions qui ne souffrent pas que M. de Mézerai en ait pu dire tout le bien qu’il en a dit. La précaution de François s’étendit jusqu’à défendre très-expressément au dauphin son fils aîné, qui fut depuis Henri II, d’avoir aucune communication avec le connétable........... Mais tout ce qu’il obtint sur son fils fut de dissimuler durant sept ans entiers l’amitié qu’il avait pour le connétable. Il ne la dissimula pas même avec tant d’adresse, que toute la cour ne sût qu’il ne se passait aucun jour sans qu’ils reçussent des lettres l’un de l’autre. Mais François Ier. ne se mit point en peine d’interrompre ce commerce, soit que le dauphin et le

  1. Mézerai, au commencement de l’Histoire de Henri II, pag. 1057 du IIe. vol. de l’Histoire de France.