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MÉLAMPUS.

ac perterrefactus ; supervolitantium avium voces intelligebat, et quæ ab iis futura edocebatur, mortalibus prædicebat. Per haruspicinam prætereà vaticinari ab iis didicit. Ad hæc Apollini propè Alpheum obviàm factus, circà cætera vaticinandi peritissimus evasit [1]. Vous trouverez plusieurs recueils touchant cette faculté des serpens dans l’ouvrage que je vous indique [2].

(F) Je réfuterais... la pensée dont on s’est servi pour prouver qu’il a prédit... les choses futures. ] Voici le pivot de cette preuve. La réputation de ce devin ne se fût pas établie à durer pendant plusieurs siècles, s’il n’eût convaincu le monde par des expériences incontestables qu’il avait le don de prédire. Permultorum exemplorun et nostra plena est respublica et omnia regna omnesque populi, cunctæque gentes, augurum prædictis multa incredibiliter vera cecidisse : neque enim Polidæ, neque Melampodis, neque Mopsi, neque Amphiarai, neque Calchantis, neque Heleni tantum nomen fuisset, neque tot nationes id ad hoc tempus retinuissent Arabum, Phrygum, Lycaonum, Cilicum ; maximèque Pisidarum, nisi vetustas ea certa esse docuisset. Nec vero Romulus noster auspicato urbem condidisset, neque Accii Navii nomen memoriâ floreret tam diù, nisi hi omnes multa ad veritatem, et mirabilia dixissent [3]. Ce raisonnement est semblable à celui que Cicéron se fait objecter en faveur de l’Oracle de Delphes. Vous le pouvez lire dans les Pensées diverses sur les Comètes [4], avec quelques réflexions qui le réfutent. C’est là donc que je dois vous renvoyer pour la réponse au passage du IIe. livre des Lois. Il y a dans Cicéron une maxime qui pourrait venir au secours de ce passage. C’est celle où il pose que le temps fait évanouir les fictions, et confirme les jugemens qui sont fondés sur la nature. Opinionum commenta delet dies, naturæ judicia confirmat [5]. On pourrait inférer de là que les oracles, ayant subsisté plusieurs siècles, n’étaient pas une fiction. Mais réfutons Cicéron par Cicéron même. Il reconnaît au IIe. livre des Lois, que l’art des augures ne subsistait plus [6]. Il avait donc eu la destinée des opinions que l’esprit humain enfante : le temps, au lieu de le confirmer, l’avait détruit.

(G) Il était un habile médecin. ] Apollodore le fait inventeur des purgatifs, et les lui fait employer à la guérison des filles de Prœtus [7]. Μελάνπους...... μάντις ὢν τής διὰ ϕαρμάκων καὶ καθαρμῶν θεραπείαν πρῶτος εὑρηκώς [8]... Ταῖς δὲ λοιπαῖς τυχούσαις καθαρμοῦ σωϕρονῆσαι συνέϐη. Melampus......... vaticinandi cognitione insignis et qui potionandi expurgandique rationem primus invenit............ reliquæ verò repurgatæ resipuerunt. Servius observe qu’on le surnomma καθαρτής, c’est-à-dire le purgeur [9] : Mais n’appuyons pas sur cela, puisque ce même grammairien insinue que les purifications inventées par Mélampus, et employées pour les filles de Prœtus, appartenaient à la religion. Prœtidas ipse purgavit lustrationibus quas invenerat. Hoc dicit, convalescente morbo, nec medicinam prodesse nec religionem [10]. C’est-à-dire que, par ces paroles,

.........Cessêre magistri
Phillyrides Chiron, Amythaoniusque Melampus [11].


il faut entendre que les maladies, dans un certain état, sont au-dessus de la médecine, et au-dessus de la religion. Chiron est donc là représenté comme un médecin, pendant que Mélampus y est représenté comme le distributeur des remèdes surnaturels. Servons-nous plutôt du commentaire de Servius sur les Églogues de Virgile. C’est là que nous trouverons Mélampus sous un personnage mêlé, en partie médecin et en partie prophète. Il apaise Ju-

  1. Apollodor., lib. I, pag. 47.
  2. L’Hiérozoicon de M. Bochart, liv. I.
  3. Cicero, lib. II de Legibus, folio 334. D.
  4. Pensées diverses sur les Com., num. 45.
  5. Cicero, de Naturâ Deorum. Voyez, tom. IX, pag. 108, citation (71) de l’article Launoi (Jean de).
  6. Dubium non est, quin hæc disciplina et ars Augurum evanuerit jam et vetustate, et negligentiâ. Itaque neque illi assentior, qui hanc scientiam negat unquàm in nostro collegio fuisse, neque illi qui esse etiam nunc putat. Cicero, lib. II de Legibus, cap. XIII.
  7. Apollodor., lib. II, pag. 85.
  8. Idem, ibidem, pag. 85.
  9. Servius, in Virgil., Georg., lib. III, vs. 550.
  10. Idem, ibid.
  11. Virgil., Georg., lib. III, vs. 549.