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ZÉNON.

Si prædicti philosophi suum illud dogmata ad hujus tam reconditæ veritatis intelligentiam retulêre [1], non modò reprehendendi non sunt, sed magnoperè etiam commendandi. Certè Parmenidem defendit, atque interpretatur Simplicius, hoc in libro ad textum 6 Bessario, 2°. libro contra Calumniatorem Platonis, capite 3, et Nicolaüs Cusa, in lib. de Filiatione Dei. Lege etiam pro eâdem re Eugubinum, lib. 3 de perenni Philosophiâ, cap. 6 et 7, et F. Mirandulam lib. 6 de Examine vanitatis, cap. I.

De tout ceci il résulte que la réponse de Diogène était sophistique, quoiqu’elle fût propre à s’attirer l’applaudissement de la compagnie. Cette réponse était moqueuse ; mais je pense aussi que le philosophe qui y avait intérêt ne fit que la mépriser. Il en rit peut-être, et il s’en moqua tout son soûl : plus heureux mille fois que le sophiste Diodore, qui ne se trouva pas en état de rire lorsqu’on l’attaqua par une maligne ironie sur ses leçons contre l’existence du mouvement. Il s’était démis l’épaule, et il fut trouver le médecin Hérophile, pour le prier de la lui remettre. Vous ne songez pas à ce que vous dites, lui répondit Hérophile : quoi ! votre épaule disloquée ? cela ne peut pas être ; car elle n’est sortie de sa place ni où elle était ni où elle n’était pas. Voilà l’une des raisons de ce sophiste pour combattre le mouvement. Si un corps se mouvait, disait-il, il le ferait, ou dans le lieu où il est, ou dans le lieu où il n’est pas. Or il ne se meut, ni dans le lieu où il est, car s’il y est il n’en sort point ; ni dans le lieu où il n’est pas, car il ne peut rien souffrir ni rien faire où il n’est point. Donc Diodore, peu capable alors de goûter cette logique, pria Hérophile de ne se plus souvenir de ces discours, et de lui fournir le remède nécessaire[2].

  1. C’est-à-dire que In divinâ bonitate sunt omnia immensuratè et unicè, sicut in monade omnis numerus uniformiter est, et in centro omnes lineæ ad se ipsæ, et ad unam initium, à quo processêre, conjunctæ et copulatæ continentur.
  2. Sextus Empiricus, Pyrrhon. Hypotyp., lib. II, cap. XXII.

ZÉNON, philosophe épicurien, natif de Sidon, soutint glorieusement l’honneur de sa secte ; car il s’acquit beaucoup de réputation [a]. Il eut entre autres disciples Cicéron et Pomponius Atticus (A), d’où l’on peut juger du temps auquel il vivait. Vossius s’y est trompé (B). On représente ce Zénon comme un philosophe qui traitait ses adversaires avec beaucoup de mépris, et fort aigrement (C). Il n’y a guère de choses par où l’on puisse mieux connaître qu’il était hardi que par l’ouvrage qu’il écrivit contre les mathématiques (D). Nous n’avons ni cet ouvrage ni celui que Possidonius composa pour le réfuter. Il y a des gens qui regrettent plus la perte de ces deux livres que celle de vingt ou trente pièces de théâtre, ou que celle des meilleurs historiens de l’antiquité.

  1. Voyez la remarque (A), citation (6).

(A) Il eut entre autres disciples Cicéron et Pomponius Atticus. ] Voici des paroles de M. Ménage : Zenonem Sidonium et Cicero et Atticus Athenis audiverunt, ut indicat ipse Cicero lib. II et V de Finibus, et lib. III Tuscul. Quæst. et libro I Academ. J’ai trouvé le passage du IIIe. livre des Tusculanes ; et comme il contient un dogme de notre Zénon, je m’en vais le rapporter. Solent isti negare nos intelligere quid dicat Epicurus. Hoc dicit, et hoc ille Græculus me audiente Athenis senex Zeno istorum acutissimus contendere, et magnâ voce dicere solebat, eum esse beatum, qui præsentibus voluptatibus frueretur, confideretque se fruiturum aut in omni, aut in magnâ parte vitæ, dolore non interveniente : aut si interveniret, si summus foret, futurum brevem : si productior, plus habiturum jucundi quàm mali. Hæc cogitantem fore beatum, præsertim si et antè præceptis bonis contentus esset, nec mortem, nec deos extimescercet. Habes formam Epicuri vitæ beatæ verbis Zenonis expressam, nihil ut