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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

— Il s’agit bien de cela, Barailles ; il faut que tu coures chez M. de la Reynie, il me faut Desgrais, il me faut cinquante exempts. Qu’on cerne les issues de cette rue, qu’on tende des chaînes, que mon suisse ait l’ordre de ne laisser sortir personne, excepté moi.

— Mais, monsieur le comte…

— Assez, Barailles, assez… Il est inouï que chez moi… dans mon hôtel… Mes pistolets… viens, suis-moi, Riom, suis-moi… Je vais aller moi-même me plaindre an lieutenant criminel…

Et, prenant ses armes, le comte sortit du boudoir, pendant que Barailles se tuait de lui crier :

— Mais, monsieur le comte, vos lettres !

Riom les reçut des mains de Barailles, et les remit à son oncle, dont l’exaspération était au comble.

En faisant sauter le cachet de l’une de ces lettres, sous le porche même de son hôtel, un éclair de triomphe illumina le front de Lauzun.

— Riom, cher Riom, dit-il en l’embrassant avec orgueil, tiens, regarde, je suis sauvé.

Riom prit la lettre que lui présentait Lauzun ; elle n’était pas signée… Un ami du comte lui annonçait seulement que cette journée même, sur les cinq heures, mademoiselle de Retz devait gagner la Touraine, sous la conduite de M. de Brancas, un ami de sa famille. Les distractions familières à ce personnage en faisaient un guide propice aux projets d’un amoureux. Lauzun fit mettre à l’instant ses chevaux à son carrosse, et commanda à son postillon de prendre la route de Touraine.

— Je ne pense pas, dit-il à Riom, que le diable prenne la poste.