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CONTE ARABE.

supplioit de retourner au harem. Les femmes en firent de même ; mais la curiosité de la fille de l’Emir étoit trop forte, elle l’emporta. À tout hasard, elle voulut courir après le phénomène.

Pendant qu’on disputoit ainsi, il partit de la lumière un trait de feu si éblouissant, que tout le monde se sauva en jettant de grands cris. Nouronihar fit aussi quelques pas en arrière ; bientôt elle s’arrêta, & s’avança du côté du phénomène. Le globe s’étoit fixé dans le vallon, & y brûloit dans un majestueux silence. Nouronihar croisant alors les mains sur sa poitrine, hésita quelques momens. La peur de Gulchenrouz, la solitude profonde où elle se trouvoit pour la première fois de sa vie, le calme imposant de la nuit ; tout concouroit à l’épouvanter. Plus de mille fois elle fut sur le point de s’en retourner ; mais le globe lumineux se retrouvoit toujours devant elle. Poussée par une impulsion irrésistible, elle s’en approcha au travers des ronces & des épines, & malgré tous les obstacles qui devoient naturellement arrêter ses pas.

Lorsqu’elle fut à l’entrée du vallon, d’épaisses ténèbres l’environnèrent tout-à-coup, & elle n’apperçut plus qu’une foible étincelle, qui étoit fort éloignée. Le bruit des chûtes d’eau, le froissement