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CONTE ARABE

plus noirs, mille projets d’une ambition impie ; & l’autre, la désolation de sa famille, & la perte de Gulchenrouz. Nouronihar croyoit entendre dans cette fatale musique, les cris de son père expirant, & Vathek, les sanglots des cinquante enfans qu’il avoit sacrifiés au Giaour. Dans ces angoisses, ils étoient toujours entraînés vers le berger. Sa physionomie avoit quelque chose de si imposant, que pour la première fois de sa vie, Vathek perdit contenance, tandis que Nouronihar se cachoit le visage avec les mains. La musique cessa ; & le Génie adressant la parole au Calife, lui dit : Prince insensé, à qui la Providence a confié le soin des peuples ! est-ce ainsi que tu réponds à ta mission ? Tu as mis le comble à tes crimes ; te hâtes-tu à présent de courir à ton châtiment ? Tu fais qu’au-delà de ces montagnes, Eblis & ses Dives maudits tiennent leur funeste empire, & séduit par un malin fantôme, tu vas te livrer à eux ! C’est ici le dernier instant de grace qui t’est donné ; abandonne ton atroce dessein, retourne sur tes pas, rends Nouronihar à son père qui a encore quelque reste de vie, détruis la tour avec toutes ses abominations, chasse Carathis de tes conseils, sois juste envers tes sujets, respecte les Ministres du Prophète,