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CONTE ARABE.

ensuite il redoubla de zèle. Les odeurs infernales des cornes & des momies se répandant de tous côtés, empestèrent l’air, & plusieurs personnes presque suffoquées, tombèrent a la renverse. Ceux qui étoient restés debout, disoient à leurs voisins ; éloignez-vous, vous empoisonnez. Morakanabad, plus malade que les autres, faisoit pitié ; par-tout on se bouchoit le nez : mais rien n’arrêta ceux qui enfonçoient les portes. Cent quarante des plus robustes & des plus déterminés en vinrent à bout. Ils gagnèrent l’escalier, & firent bien du chemin dans un quart-d’heure.

Carathis, que les signes de ses muets & de ses négresses alarmoient, s’avance sur l’escalier, en descend quelques marches, & entend plusieurs voix qui crient : voici de l’eau ! Comme elle n’étoit pas mal leste pour son âge, elle regagna vîte la plate-forme, & dit à son fils : un moment ; suspendez le sacrifice ; nous allons avoir de quoi le rendre encore plus beau. Certaines bêtes s’imaginant, sans doute, que le feu étoit à la tour, ont eu la témérité d’en briser les portes, jusqu’à présent inviolables, & viennent avec de l’eau. Il faut avouer qu’ils sont bien bons d’avoir oublié tous vos torts ; mais n’importe. Laissons-les monter, nous les sacrifierons au Giaour ; nos muets