Page:Becque - Théâtre complet, 1890, tome 1.djvu/231

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la forme que vous voudrez. Parler n’est rien, rêver, ce n’est rien non plus ; ce qu’il faut, c’est agir, vivre ; vous seriez plus heureuse cent fois d’exécuter la moitié de vos fantaisies, que d’en inventer constamment de nouvelles. Ce que je vous dis, c’est pour vous ; un autre serait à ma place que je vous en dirais tout autant ; mais enfin je suis la, trouveriez-vous facilement un compagnon plus aimable que moi ? J’ai mes jours où je suis aimable ; on m’a assuré que j’étais charmant quand je le voulais bien… Ta tête me ravit et m’exaspère… Je suis fou de tes yeux qui n’ont d’autre défaut que leur innocence… Ta bouche, (il cherche à l’embrasser, elle le repousse, il lui saisit le bras.) Ton bras est ferme et droit, il pourrait tenir une épée ; tu as les flancs d’une amazone ; belle comme tu es, avec ta nature et les appétits, veux-tu te condamner toi-même ; épouser quelque saltimbanque et te mor-. fondre entre les quatre murs du mariage ; soit, mais tu regretteras toujours l’existence que je t’aurai offerte, active, puissante, désordonnée, où la volonté est sans limite et, les extravagances sans frein.

HÉLÈNE

Ah ! que je maudis le jour où nous nous sommes rencontrés. Pourquoi avez-vous pris la rue où je passais plutôt qu’une autre ? Pourquoi vos regards se sont-ils croisés avec les miens ? Pourquoi m’avez-vous suivie et retrouvée ? Pourquoi ! Pourquoi ! Est-ce que ma liberté, mon honneur, ma vie m’appartiennent ? Puis-