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OBSERVATION

et de salut public, va me poursuivre pour avoir osé imprimé des noms devenus un symbole de meurtre et d’anathême, dans un tems où je suis tenté de croire quelquefois qu’il n’existe plus en France ni religion; ni vertu[1].

Si je pouvais penser qu’un homme de bien et un véritable ami de sa patrie fût décoré dans ces jours d’horreur et de désolation, du nom d’honnête homme et de patriote, je commencerais à concevoir un peu d’espérance pour la fin de nos calamités ; mais où sont-ils, les patriotes ? je frémis de le dire; je les cherche parmi tous ceux qui en ont exclusivement usurpé le nom, et je n’en trouve que bien peu. Je ne veux nommer ni compromettre personne ; car j’ai lu dans l’histoire que c’étoit un crime sous Néron et sous Louis XI, de hazarder une vérité trop marquée, et je ne crois pas que les Romains du règne de Néron et les Français du règne de Louis XI eussent voulu échanger leur destinée contre la nôtre… et nous parlons de tyrannie ! grand Dieu ! tout mon sang se glace… la partie saine du genre humain, et la postérité, sauront dis-

  1. Mon plan, si le ciel permet que je recouvre ma santé, et que je sois rendu à la vigueur de l’âge, est de consacrer une partie de mon tems à l’Histoire de la Lune ; et de donner cette Histoire au public par souscription, en tant de volumes ou livres délivrés à.des époques fixes. Une histoire de ce genre peut fourmiller d’allusions, de vues politiques, cacher sous le voile de la gaîté de grandes leçons morales, et faire peut-être époque, j’ose le dire, dans les fastes de le philosophie.