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DE L’AUTEUR.

qui font parade de leur bravoure, toute en signalant leur méfiance ombrageuse, et en s’entourant de précautions tyranniques pour veiller à leur sureté. Sachez, messieurs les gens subtils, que l’attitude d’un peuple libre est celle de la décence et de la fraternité : que la hauteur d’une révolution ne peut se mesurer, que par ce qu’y ont gagné la Religion et les mœurs, et que se tenir debout, pour opprimer le faible et pour vexer la vertu, vaut moins que d’être assis pour mesurer, avec sans froid, l’étendue des devoirs de l’homme. À qui cela s’adresse-t-il, répliqua l’un des Vénuriens, au nom de ses compatriotes ? Est-ce une allusion que vous voulez faire ? Vous calomniez le peuple de Vénus. Vous trahissez la nation Vénurienne. Vous êtes… » Que sais-je, moi, et beaucoup d’autres excellentes raisons qu’il lui donna ; mais mon homme, insensible à tout l’étalage de cette philosophie, lui tourna le dos avec un rire moqueur, et s’éloigna en levant les épaules. Peut-être aussi, car il faut être juste, peut-être ne savait-il pas bien encore ce que signifiait tout cela. Les Vénuriens n’en furent pas moins irrités ; et ils promirent qu’on le leur paierait, et qu’ils se faisaient fort de punir, etc. Mais je viens bien vîte à la révolution lunaire.

Il y a plusieurs centaines d’années que l’Empereur, résidant à Lunol, possédait les deux tiers du globe lunaire ; le reste était au pouvoir de plusieurs petits princes. Tous ces messieurs faisaient entr’eux, quand et comme cela leur plaisait, le commerce des peuples, qu’on