Page:Benjamin - Grandgoujon, 1919.djvu/271

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
273
GRANDGOUJON

fait rien, se grouille et aille à l’église rapport aux sacrements, si Monsieur ne veut pas que Madame nous quitte comme un pauvre chien ; puis qu’elle rapporte du buis et de l’eau bénite, car c’est pas quand Madame sera passée qu’on aura la tête à tout ça !

— Oh ! laissez-nous, pour l’amour du ciel ! grondait Grandgoujon. La sœur sait ce qu’elle doit faire, et je m’en rapporte à la sœur.

Il allait, venait, geignait, pleurait.

— Monsieur Punais a raison, se lamentait-il. C’est moi qui aurais dû être emporté au front… et c’est elle qui… au cirque… oh !

Quand Madame des Sablons le voyait ainsi, elle soupirait en respirant un mouchoir parfumé : « Pourra-t-il tenir ? »

Sur tous les meubles traînaient des tasses, du linge, des potions, et, douloureux, bon à rien, encombrant, il énervait la sœur, seule personne active, mais qui se trouvait mal nourrie, disant à la cantonade :

— Il ne doit guère y avoir d’argent dans cette maison-là !

Elle ne pensait qu’à sortir, prétextant des offices aux paroisses voisines.

Colomb était en province ; mais Monsieur Punais l’avait averti. Alors, en deux jours il envoya deux télégrammes d’une fièvre amicale, où on lisait un appel à la confiance : « car la mort ne prend que ceux qui s’abandonnent. Courage. Colomb. » Madame Grandgoujon s’était toujours abandonnée ; elle fut jusqu’au bout selon son