Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/159

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serait de l’Académie, il le rendrait au dictionnaire. Incompéter, nous incompétons, plût à Dieu que j’incompétasse !…

Nous nous amusions tous à ce jeu de la fable-express qu’on a un peu déformé depuis, ce me semble, et qui, à l’origine, avait plus de tenue. L’auteur des Humbles en apportait d’excellentes, malicieuses sans fiel, d’une facture souple, qu’il composait aux archives de la Comédie-Française dont il était le bibliothécaire. L’une d’elles était devenue célèbre et passait de bouche en bouche comme une épigramme de Lebrun, le maître du genre, au siècle dernier. Ceux qui ne se l’attribuaient pas, après l’avoir modifiée à leur usage, la donnaient au pauvre Coppée, qui s’en défendait comme un diable, à bon droit du reste. Il était en effet en fort bons termes avec le lundiste du Temps dont il estimait à son prix le labeur opiniâtre et la vertu professionnelle. Or la fable disait :

Ayant cru faire un mot l’oncle se mit à rire.

Moralité.

Un sot trouve toujours un plus sot qui l’admire.

Les compliments qu’il en recevait chez Lemerre l’horripilaient autant qu’ils me délectaient, et pour cause. On avait pendant toute la guerre de 1870-1871, récité, débité et même joué mon poème : Le Maître d’École sous la signature de mon glorieux camarade de lyre et je n’étais pas fâché de l’entendre gémir d’un nouveau sic vos non vobis vengeur. À la fin cependant je revendiquai la paternité du distique, ce qui d’ailleurs n’avança pas beaucoup mes