Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 2, 1912.djvu/60

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hélas, introduit à la dévote vie, et c’est pourquoi je m’abstiens dans le monde de me réclamer de ma généalogie canonisée. On n’y croirait pas.

Du reste s’il me fallait enchaîner les genuit autem de ladite généalogie j’en jetterais volontiers ma langue aux chiens. Tout ce que je puis vous dire et je me hâte, c’est que la vénérable Marie de Chantal n’y était pour rien, et c’est ce qu’il y a de plus sûr dans mon atavisme. Pour ma chère aïeule sa certitude ne s’ombrait pas d’un doute. De qui aurait-elle tenu, sinon de la famille, le petit princeps et aussi le joli reliquaire d’argent ciselé, contenant un morceau de l’aube du saint, qui breloquait à sa grande chaîne de montre, même lorsqu’elle lisait du Paul de Kock, son auteur de chevet ? Tout cela venait bel et bien d’Annecy, en Savoie, du temps où la Savoie était heureuse, vers 1600, lorsque M. de Sales y promenait son évangélique houlette.

Je n’ai pas ici, ni ailleurs, à dresser mon arbre de genèse. L’intérêt de mes « Rougon-Macquart » ne s’impose pas à la critique physiologique, les ramures d’un laurier ne valant que par le laurier même et s’il fleurit au bord d’un Eurotas. Mais on m’excusera de penser qu’il peut y repousser quelque belle et forte branche, dont la souche importe aux biologistes, et je leur dois dans mes souvenirs le document zoliste de notre greffe animale.

Sous sa double orthographie de Morel ou Maurel, il y a chez nous une race innombrable et partout répandue, qui peut, à sa façon, se réclamer, elle aussi, des Croisades, mais, pour ainsi dire, à l’envers. Ni Charlemagne, ni son neveu Roland, ni même Charles Martel n’ont exterminé les Sarrasins,