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de l’observation et de l’expérience.

de la raison. « À l’homme seul appartient de vérifier ses pensées, de les ordonner ; à l’homme seul appartient de corriger, de rectifier, d’améliorer, de perfectionner et de pouvoir ainsi tous les jours se rendre plus habile, plus sage et plus heureux. Pour l’homme seul, enfin, existe un art, un art suprême, dont tous les arts les plus vantés ne sont que les instruments et l’ouvrage : l’art de la raison, le raisonnement[1]. »

Nous donnerons au mot expérience, en médecine expérimentale, le même sens général qu’il conserve partout. Le savant s’instruit chaque jour par l’expérience ; par elle il corrige incessamment ses idées scientifiques, ses théories, les rectifie pour les mettre en harmonie avec un nombre de faits de plus en plus grands, et pour approcher ainsi de plus en plus de la vérité.

On peut s’instruire, c’est-à-dire acquérir de l’expérience sur ce qui nous entoure, de deux manières, empiriquement et expérimentalement. Il y a d’abord une sorte d’instruction ou d’expérience inconsciente et empirique, que l’on obtient par la pratique de chaque chose. Mais cette connaissance que l’on acquiert ainsi n’en est pas moins nécessairement accompagnée d’un raisonnement expérimental vague que l’on se fait sans s’en rendre compte, et par suite duquel on rapproche les faits afin de porter sur eux un jugement. L’expérience peut donc s’acquérir par un raisonnement empirique et inconscient ; mais cette marche obscure et spontanée de l’esprit a été érigée par le savant en une

  1. Laromiguière, Discours sur l’identité. Œuvres, t. i, p. 329.