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exemples de critique expérimentale physiologique.

fait mentionné ci-dessus comme irrationnel et que j’ai voulu répéter des expériences, bien que je ne doutasse pas de leur exactitude, comme fait brut. J’ai vu alors[1] que le venin du crapaud tue la grenouille très facilement avec une dose qui est de beaucoup insuffisante pour le crapaud, mais que celui-ci s’empoisonne néanmoins si l’on augmente assez la dose. De sorte que la différence signalée se réduisait à une question de quantité et n’avait plus la signification contradictoire qu’on pouvait lui donner. C’est donc encore l’irrationalisme du fait qui a porté à lui donner une autre signification.

§ III. — Le principe du déterminisme exige que les faits soient comparativement déterminés.

Nous venons de voir que notre raison nous oblige à repousser des faits qui ont une apparence indéterminée et nous porte à les critiquer afin de leur trouver un sens rationnel avant de les introduire dans le raisonnement expérimental. Mais comme la critique, ainsi que nous l’avons dit, repose à la fois sur la raison et sur le doute philosophique, il en résulte qu’il ne suffit pas qu’un fait expérimental se présente avec une apparence simple et logique pour que nous l’admettions, mais nous devons encore douter et voir par une contre-expérience si cette apparence rationnelle n’est pas trompeuse. Ce précepte est de rigueur absolue, surtout dans les sciences médicales qui, à raison de leur com-

  1. Claude Bernard, Cours de pathologie expérimentale (Medical Times, 1860).