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PAUL

selon elle, mettre obstacle aux grandes vues qu’elle a sur moi. Il n’y a qu’elle qui puisse me voir à la grille, ainsi qu’un vieux seigneur de ses amis, qui a, dit-elle, beaucoup de goût pour ma personne. Pour dire la vérité, je n’en ai point du tout pour lui, quand même j’en pourrois prendre pour quelqu’un.

« Je vis au milieu de l’éclat de la fortune, et je ne peux disposer d’un sou. On dit que si j’avois de l’argent cela tireroit à conséquence. Mes robes mêmes appartiennent à mes femmes-de-chambre, qui se les disputent avant que je les aie quittées. Au sein des richesses je suis bien plus pauvre que je ne l’étois auprès de vous ; car je n’ai rien à donner. Lorsque j’ai vu que les grands talents que l’on m’enseignoit ne me procuroient pas la facilité de faire le plus petit bien, j’ai eu recours à mon aiguille, dont heureusement vous m’avez appris à faire usage. Je vous envoie donc plusieurs paires de bas de ma façon, pour vous et maman Marguerite, un bonnet pour Domingue, et un de mes mouchoirs rouges pour Marie. Je joins à ce paquet des pepins et des noyaux des fruits de mes collations, avec des graines de toutes