Page:Berrichon - Jean-Arthur Rimbaud, 1912.djvu/164

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chicane, dont retentissait presque perpétuellement à son endroit le pavillon de l’ancien notaire, pour aller oublier ses chagrins matrimoniaux dans la compagnie du poète du Baleau ivre, dont la conversation lui ouvrait bien des fenêtres sur du rêve jusqu’alors inaperçu. Sa sensibilité intellectuelle, son sentimentalisme s’émouvaient fortement des spéculations métaphysiques, du sensorialisme et des ambitions linguistiques de Rimbaud.

Précisément, celui-ci s’ingéniait à une rénovation de l’art poétique tout entier. Il venait d’écrire le sonnet des


VOYELLES :


A, noir ; E, blanc ; I, rouge ; U, vert ; O, bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes.
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfe d’ombre. E, candeur des vapeurs et des tentes,
Lance de glaçons fiers, rais blancs, frissons d’ombelles !
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes.

U, cycles, vibrements divins des mers virides ;
Paix des pâtis semés d’animaux ; paix des rides
Qu’imprima l’alchimie aux doux fronts studieux.